Malgré Haïti, elle est aux origines et de l’entendement des programmes RVC et
PSC - Première partie
Par Jean Laforest Visene de Lyvia Tulce
La crise socio-politique qui secoue Haïti a mis en
relief combien les efforts en matière de Désarmement, Démobilisation et
Réinsertion et la Reduction de la Violence Communautaire (RVC), ainsi que ses
assimilés comme Programme de Sécurité Communautaire (PSC) étaient, en tant que
tels, insuffisants. Il est évident que des armes illégales et les activistes de
la violence armée en Haïti sont innombrables. On les trouve partout, dans les
villes comme dans les bidonvilles, dans les milieux ruraux comme dans les
milieux urbains, dans les zones réputées chaudes comme dans celles jadis
considérées comme plus ou moins sûre. Comment doit-on comprendre cette
inquiétante démonstration de l’existence des armes et le niveau de volatilité
de la sécurité dans le pays, alors qu’Haïti, malgré elle, est aux origines et
de l’entendement des programme RVC, PSC et assimilés ?
I.
CADRE D’ORIENTATION
a.
Perspective et organisation du texte
Cette publication contient une série de quatre
articles, Dans cette série, nous revisitons l’approche expérimentale, des
programmes mis en œuvre sous le chapeau de la stabilisation et la recherche de
la sécurité communautaire, en insistant sur le fondement historique de la
violence en Haïti. La littérature locale et internationale sont bondées de référence
liant la situation sécuritaire d’Haïti à un problème d’accaparement des
ressources, donc de non-distribution de la richesse du pays. Au cours de cet exercice nous instrumentaliserons
les concepts : Violence communautaire, Groupes
armés, Sécurité communautaire, Réforme du Secteur de Sécurité (RSS). Cette
série est développée comme suite, y inclus la présente :
·
Première partie : « Malgré tout, Haïti aux origines et de l’entendement des
programmes RVC et PSC » ;
·
Deuxième partie : « RRSVC comme Outil de stabilisation et de
sécurisation communautaire » ;
·
Troisième partie : « Postulat d’ordonnancement philosophique et d’opérationnalisation du
RRSVC » ;
·
Quatrième
partie : « Esquisse
méthodologique pour une réorientation du RRSVC ».
b.
Raison de ce texte
Cette publication, sous la thématique « RRSVC en Haïti et pays congénères » aborde
les fondements des actions en matière de DDR de seconde génération et de PSC
que nous mettons dans un paquet global de Programme de Réduction des Risques
Sécuritaires et de la Violence Communautaire (RRSVC). Les différentes parties
du texte constituent notre contribution afin d’instituer la mémoire qu’Haïti
est le berceau du RVC (La principale forme de DDR de seconde génération)
et aussi du PSC.
Toutefois, le texte vise principalement à apporter
une contribution pour initialiser un débat public sur les problèmes de fonds et
les limites des programmes que nous englobons dans notre concept : « Reduction
des Risques de Sécurité et de Violence Communautaire (RRSVC) ». Malgré, de
toute évidence, ces types d’actions, initiées, sous le label RRSVC, sont des
innovations issues de l’imagination coopératrice afin de contribuer à
l’établissement de la paix dans des pays en crise. Une telle réflexion devrait
permettre qu’on pose notre regard sur la panoplie d’outils afin que
collectivement nous isolons les bonnes et les mauvaises pratiques.
II.
AU-DELA DE LA CONCEPTION HAÏTIENNE DU RRSVC
a.
Des outils connectés à une parapluie d’autres
Dans leur conception et leur forme d’action, le
PRC, la RVC et assimilés, sans oublier leur flexibilité, à part d’être un outil
de DDR (Désarmement, Démobilisation et Réinsertion) sont des actions
sous-jacentes à la coordination globale supportant d’une manière large la mise
en œuvre de la stratégie de sécurisation et de stabilisation. Il y inclut la Réforme
du Secteur de sécurité (SSR), la Réforme du Secteur de la Justice (RSJ), et
même un appui à la Protection des civiles et l’intermédiation dans les conflits
intercommunautaires.
Comme l’appellation des sous-composantes du RRSVC
l’indique, chacune d’elles à influer positivement sur la sécurité humaine et
d’amorcer les conditions d’une reprise socio-économique de leur zone cible. Ces
types d’actions dans des programmes internationaux de stabilisation et de
sécurisation, tels qu’en Haïti et dans d’autres pays congénères, sont encore à
une phase de consolidation expérimentale. Elles constituent des approches très
populaires et considérées comme des moyens additionnels innovants pour adresser
des problèmes de sécurisation et de stabilisation, surtout dans des pays qualifiés
de menace pour la sécurité internationale pour reprendre la terminologie
habituelle des résolutions du Conseil de Sécurité des Nations Unies (CSNU). Dans
divers milieux des pays développés elles sont aussi mises en avant comme action
de prévention des risques de la délinquance juvénile dissimulée à travers des
plans sociaux globaux.
b.
Au regard de la perspective DDR en Haïti
De
son initiation en République d’Haïti, en 2006, à son implémentation en
République démocratique du Congo, en 2016, une décennie d’expérimentation de
l’approche Réduction de la Violence Communautaire (RVC/RVC) s’est écoulée.
Durant, (i) des schémas de RVC ont été élaborés ; (ii) des forces et des
faiblesses dans leur expérimentation sont mis en relief ; (iii) des
efforts de théorisation essayé d’adresser les écarts observés ont été
élaborées. Analysant le statut de RVC en termes d’approche et de ses applications
particulières, la nécessité d’une revisite de l’approche et d’incitation à une
discussion constructive sur son développement et son expansion paraît comme un
besoin patent. Certes, l’approche a fait ses preuves, mais les
avancées en termes de cadrage méthodique et de pragmatisme par rapport aux buts
resteraient à améliorer.
Comment
l’approche RVC peut être efficace au désengagement et/ou dislocation des
groupes armés et/ou criminelles, c’est-à-dire être un artisan du Désarmement et
de la Démobilisation (DD) en passant par la création et l’animation d’un
espace de dialogue entre les acteurs en conflit, la création d’un climat de
confiance et la facilitation aux actions subséquente ? Comment peut-elle,
par la suite appuyer le processus de Réinsertion / Réintégration (RR) des
combattants démobilisés, ce qui voudrait dire être le tremplin de l’initiation
du RR, d’appui à la coordination du transfert du suivi du processus RR au
niveau communautaire ? Comment elle peut contribuer à aux actions visant le
contrôle et la circulation des armes (petits et grands calibre) dans les
communautés ? Comment elle renforcer la capacité des communautés à
prévenir et agir sur des facteurs et des vecteurs de la violence ? Telles
sont les questions en filigrane de notre réflexion qui s’inspire, comme nous le
disions, des ambitions au premier balbutiement de ce type de DDR.
Nous
soutenons, ici, que RVC et PRC sont, en principe, des outils institutionnels de
DDR dans leur vision classique mais, au service d’une démarche de Sécurisation,
de Stabilisation et de Développement devait se situer à une sphère plus
ambitieuse et devrait faire preuve de plus d’imagination et de coopération à un
niveau plus large. Au relief des velléités de RVC à travers les résolutions du
Conseil de Sécurité des Nations Unies (CSNU), la démarche de RVC ne s’est pas
suffisamment structurée autant du programme DDR traditionnel. De ce fait, le RVC
devait se poster comme un héritier
puisant dans la boîte à outils conçu pour la gestion du programme DDR traditionnel
ou s’assurer d’une version adaptée de ces outils pour une meilleure efficacité
de ses interventions. Car, le système de suivi et d’évaluation mis en place
pour le DDR classique (DDR de première génération) donne une certaine garantie
de cadrage méthodologique du programme, ainsi que la gestion des risques dans
sa mise en œuvre.
Eu
égard aux excursions observées dans les pratiques de RVC, une identification
des formes de violence devant l’intéressé, un regard sur son champ
d’intervention, son ordre philosophique et son opérationnalisation, et les
facteurs et vecteurs de la violence à être priorisés et considérant les bonnes pratiques
et celles contre-productives, nous faisons, en fin de texte, des propositions
pour un recadrage de RVC aux regards des velléités et perspectives initiales de
l’approche.
III.
DES ATTITUDES FLIBUSTIÈRES A L’AVENEMENT
D’UNE VIOLENCE EXACERBEE DANS L’HAÏTI CONTEMPORAINE
Sociologiquement, la société
haïtienne, depuis sa fondation est conçue pour engendre des foyers de tension
sociale et d’insécurité humaine. En effet l’accès restrictive de la majorité
populaire aux ressources a conduit à des actions intempestives de réponse désespérée
dictée par l’instinct de survie qui anime tout individu ou groupe ayant une
conscience collective de leur existence et de leur solidarité. Dès son début,
la république était organisée en des groupuscules politiques et commerçantes
fonctionnant suivant une philosophie de prédation et machiavélique de protection
d’intérêts. Une vision que nous qualifions d’introspectif et d’inintelligence
et de voyeurisme intellectuel.
A ce sujet, les propos du
père de la patrie haïtienne et premier Président de cette république,
Jean-Jacques Dessalines (1804-1806) à l’endroit de ses généraux, mulâtres pour
la plupart, était sans équivoque. Il disait : « Et les pauvres noirs dont leurs pères sont en Afrique, n’auront-ils
donc rien ». Ces généraux se sont accaparés de toutes les terres
cultivables, ne laissant rien à la majorité des nouveaux libres noirs. S’amorce
ainsi un cercle vicieux de distanciation sociale entre les fils et les filles
de la première république noire indépendante du monde, aboutissant à la
création de deux groupes antinomiques ceux qui sont fortunés et qui en ont trop
et ceux dépouillés de leur droit légitime et qui n’en ont rien. En fait, en
s’accaparant de toutes les terres arables l’intention était de reprendre le
même système d’exploitation en remettant sous les jougs d’une nouvelle forme
d’asservissement, dans le moindre des cas à travers d’un système d’exploitation
rentière. Cette manière d’accaparement des richesses du pays naissant s’est
perdurer jusqu’aujourd’hui.
Cette attitude flibustière [1] de la classe possédante [2] politique et de l’élite
intellectuelle, ainsi que celle commerçante des émigrés arabo-occidentale
d’Haïti, a créé définitivement deux extrémités économiques dans un seul
pays : Les enrichis et les appauvris. En effet, la classe politique, la
classe possédante, l’élite intellectuelle ainsi que la nouvelle classe
commerçante d’Haïti se comportent comme ces pirates d’antan, détournant leur
proie pour se le placer à l’extérieur tout en se casant dans leur repaire, illusoirement
inaccessible. Le système d’exploitation rentière institué a complétement dérangé
le paysage économique local, créant de l’intérieur un cercle vicieux de
dépendance dans tous les domaines.
Face à une telle matrice de
la stature économique et politique, la majorité nationale se réfugie
derrière des clichés symboliques de résistance, de subsistance, voire
d’instinct de survie engendrant dans les têtes et dans les cœurs une
distanciation introvertie à travers de représentations typiques. Ainsi, des
clichés Ti Wouj - Nèg nwè, Bourgeois - Paysans
/ Bas-peuple le pays a transité vers des distinctions plus exclusives, à en
citer comme, Nèg anwo - Nèg anba, OP - Baz,
Militan - etidyan, Manm ti komite Legliz (TKL). Ces clichés symboliques deviennent des
réflexes d’une conscience collective des masses d’appartenance à des groupes
sociaux unique de condition. Ainsi, émiettant davantage le tissu social haïtien
déjà fragilisé par une « clanisation »
arbitraire depuis l’indépendance celui de l’haïtien nègre pure de race
d’Afrique et l’haïtien de couleur issue des rapports entre les colons blancs et
des esclaves négresses. Cette intense clivage de la conscience collective des
masses populaire haïtienne à faciliter des récupérations à des fins égo-économiques
des membres de la minorité bourgeoise entrée elle-même scission et déchirement
internes pour, soit la conservation de monopole de sous-clans, soit l’accès à
des secteurs d’activités économiques déjà contrôlés par d’autres.
Ainsi, à côté de la violence
légitime détenus par les institutions républicaines de l’État, des factions
économiques et politiques flibustières détiennent le monopole de la violence
illégitime. L’accaparement de ce pouvoir est dû au fait de l’émiettement de la
classe populaire accroupi dans des bidonvilles dans des conditions d’existence exécrables
à la recherche d’accomplissement d’un rêve libertaire et d’un mieux-être à proximités
les grandes agglomérations urbaines du pays. La vulnérabilité de la classe
populaire s’est donc instrumentalisée à des fins de gain des clans économiques
et politiques.
Construite sur une telle base
de jeu d’acteurs politiques et économiques, opportun d’une école d’exclusion et
étrangères aux caractéristiques sociales internes, d’une église assujettie aux intérêts
et aux valeurs de la même mode d’exploitation esclavagiste d’antan, des vraies
forces spirituelles du pays fonctionnant dans l’ombre du réel social, d’alliances
instable entre les groupes sociaux, de motivations complexes et conséquemment
de forces et de régimes politiques sans véritable possibilité et parfois
capacité de vision d’ensemble, parsemé d’une perception internationale étriquée
de la réussite d’Haïti que le pays a entretenu un système de relations sociales
propices à la catastrophe consommé en 2004. Au lieu de l’intégration et
l’engagement de l’élément haïtien dans les affaires de son pays on a assisté
plutôt à un éloignement de l’être haïtien des centres vitaux des dimensions
économiques, sociales et culturelles du pays. Ainsi, la vulnérabilité et la
fracture instituées ont conduites à une désintégration du rêve indépendantiste haïtien
de 1804 d’établir une société juste, inclusive, de vraie liberté et de
fraternité pour ses fils et ses filles et la société universelle.
Ce contexte sociologique
haïtien de crise complexe, à magnétisme d’éloignement permanent des motivations
et intérêts des forces sociales du pays, de récupération opportuniste de la
fragmentation de la classe populaire, s’amenuisent les barrières pour un
éclatement féroce de la société globale du pays que les formes de gouvernances autocratiques
et dictatoriales ont, pendant longtemps, retenues au ralenti. Avec l’avènement de
la démocratie les verrous de rétention de cet éclatement se sont complétement effondrées,
laissant ainsi la place à une manifestation visible l’intense flamme dans la
poudrière flibustière, longtemps confinés dans les parties invisibles de la
stature sociale haïtienne. Deux mille quatre n’était pas un événement
conjoncturel mais sociétaire et communautaire, méritant d’être adressé avec des
réponses à essence adapté aux conditions de cet éclatement.
IV.
HAÏTI ET LES DEBUTS DES FORMES D’ACTIONS
RRSVC
4.1.
Le contexte politique et sécuritaire de 2001 à 2004
A la suite des élections conduisant
au retour de Jean-Bertrand Aristide au pouvoir en 2001 en République d’Haïti, des
protestations collectives mettent en présence deux grands groupes dénominatifs.
D’un côté se trouve le groupe connu sous le label « Rat Pa Kaka »
appelé ainsi pour leur mot d’ordre « Rat
pa kaka, sourit pa travèse lari ». Ce groupe est aussi qualifié dans la
littérature événementielle de l’époque de « chimère ». Il est l’allié
du président au pouvoir. De l’autre, se trouve le groupe sous le label de « Grenn
Nan Bouda (GNB) pour la plupart de jeunes universitaires et de leur mentors,
orchestré particulièrement par la haute classe commerçante d’Haïti et
ostensiblement par la classe politique de l’opposition. Entre 2002 et 2004
l’affrontement entre des deux groupes rivaux a complétement détérioré le climat
sécuritaire du pays. Au début du mois de février de l’année 2004, un nouvel
élément, sous l’appellation de Front Révolutionnaire du Nord (FRN) plus connus
comme l’Armée du Nord, dirigé par un ancien Militaire et commissaire de Police
dissident au pouvoir d’alors, Guy Philippe rentre en selle et se place aux
côtés de l’opposition pour chasser le Président en poste. Face à une
organisation sécuritaire constituée seulement de la jeune force de Police
Nationale d’Haïti, puisque les Forces Armées d’Haïti (FA d’H) ont été dissoutes
par le Président Jean Bertrand Aristide à son retour d’exil en 1994, l’armée du
Nord bien équipé, depuis son fief dans le département de l’Artibonite, défait
la PNH sur son parcours et fait route à Port-au-Prince afin, affirme son leader,
de chasser le Président du pouvoir.
Mobilisé particulièrement à
Port-au-Prince, le groupe de Rat Pa Kaka se mobilise pour affronter l’armée du
Nord dans la capitale. Avant l’arrivée de l’armée du nord à Port-au-Prince,
volontairement ou forcé, le Président Jean Bertrand Aristide a laissé le
pouvoir le 29 février 2004 et s’est ou s’est fait exiler en République
Centrafricaine (RCA). La présence d’une force multinationale, composé en
particulier de la France et des États-Unis, a empêché la rentrée de l’Armée du
Nord à Port-au-Prince et ainsi éviter les affrontements entre cette dernière et
les membres du groupes Rat Pa Kaka dans la capitale. Néanmoins le groupe de
l’armée du Nord, composés d’anciens militaires, des membres l’ancien groupe
paramilitaire connus sous le nom de FRAPPE et opposant au pouvoir lavalasse durant
la période de coup-d ’État contre le sieur Aristide entre 1991 et 1994, et de
membres de partis opposants au pouvoir lavalas, reste très actif dans la partie
du Nord. De leur côté, le groupe Rat Pa Kaka cris au Kidnapping du Président
Aristide et lance une opération dénommé « Opération Bagdad » créant
une situation d’insécurité particulière d’insécurité particulière dans l’aire de
Port-au-Prince et des zones acquises à la cause de lavalasse.
4.2.
De l’avènement de la force d’interposition des Nations
Unies en Haïti
Le même jour du départ de
Jean Bertrand Aristide du pouvoir, le Conseil de Sécurité des Nations Unies (CSNU)
a adopté la résolution 1529 autorisant le déploiement d’une Force
Multinationale Intérimaire (FMI). Le 30 avril 2004, à travers la résolution
1542, a été institué dans le pays une mission multidimensionnelle de
stabilisation connu sous le sigle MINUSTAH (Mission des Nations Unies Pour la
Stabilisation en Haïti) dont l’un des aspects de son mandat était de conduire
un programme de Désarmement, Démobilisation et de Réinsertion (DDR). En terme
du volume du travail à abattre, une évaluation conduite par le chercheur
brésilien Robert Muggah (Genève, 2005) [3], indiquait un chiffre de plus de 170 000 armes légères illégales, surtout
des pistolets (38,9 mm) et des revolvers (5,56 mm et 7,62 mm) des armes
créoles), des fusils d’assaut (7,62 mm) en circulation dans le pays et de toute
évidence menaceraient la sécurisation et la stabilisation du pays. Ce chiffre
ne prendrait pas en compte les armes les armes semi- automatiques comme M16,
M14, PMK, Uzi illégalement en circulation dans le pays, ni celles, certes
légalement enregistrées, mais détenus par les anciens membres des forces de
sécurité étatiques. Ces armes sont reparties entre des groupes très diversifiés
allant des ex-Forces armées d’Haïti (FADH), des anciens paramilitaires (du
FRAPH), des anciens membres de la garde présidentielle, des organisations
populaires (OP) / milices d’auto-défenses / des « baz », des groupes
criminels organisés dont une partie est appelé zenglendos en raison de son mode opératoire de nuit, des sociétés
de sécurité privées, des membres de la classe politique, jusqu’aux particuliers.
Comme l’a indiqué Muggah (OP. Cit) :
« Les élites civiles et des segments des communautés
plus pauvres détiennent d’importantes quantités d’armes - même si c’est pour
des raisons très différentes souvent. Des éminences grises locales - fréquemment
liées à des groupes armés au sein de communautés plus pauvres - n’hésitent pas
à recourir à la violence armée pour défendre leurs intérêts. Le monopole local
de la violence est devenu un signe de vrai pouvoir ».
4.3.
Nécessité d’une approche adaptée au contexte spécifique d’Haïti
De concert la mission des
Nations Unies, la partie national, représentée par le Conseil National de
Désarmement (CND), a mis en place un programme de DDR de 2004 à 2006. A côté de
ce programme un bureau pour la prise en charge des militaires démobilisé, devant
faire le travail complémentaire du programme de DDR a été mis en place. Suite
aux infructueuses pérégrination de récoltes des armées, supposément 300,000
armes en circulation, la question de l’adaptabilité de la stratégie de DDR a
été soulevée dans les milieux organisationnels et critiques.
Il faut dire que le
programme était conçu sur le modèle classique de DDR implémenté dans des
contexte de conflit mettant en présence des groupes armées ayant la posture de
véritable organisation armée, structurée et hiérarchisée et soumis à une forme
de discipline militaire. En effet les groupes en présence en Haïti ne
répondaient pas aux critères des groupes armées formelles. D’ailleurs, ils
étaient l’émanation d’une conjoncture politique particulière, quoique résultant
d’un conflit latent entre le courant lavalasse et les partis de l’opposition,
mais qui n’était pas fait l’objet d’une organisation armée. Sur la base d’une compréhension
de la structure et de la dynamique des groupes armés, en 2006, opté pour un
type non classique adapté au contexte sécuritaire de la République d’Haïti et
des formes la menace pour la sécurité et la stabilisation du pays. Ainsi, une nouvelle
approche de Réduction des
Risques Sécuritaires et de Violence Communautaire (Désarmement, Démobilisation et de
Réinsertion (DDR) de seconde génération.
Cette approche est Réduction des Risques Sécuritaires et de
Violence Communautaire connue sous l’appellation de Programme Réduction de la
Violence Communautaire (RVC) [4] plus populaire sous sa traduction
en anglaise « Community Violence
Reduction (RVC) Programme ». Comme son origine le laisse supposé, un
tel programme se focalise sur la prévention et la déconstruction de la violence
armée [5]. Cette génération de DDR se
proclamait être efficace afin d’adresser des problèmes de sécurité et de
stabilité communautaire, en particulier ceux qui sont le fait de l’existence
des facteurs et des vecteurs de la violence au sein de la communauté elle-même et
plus spécifiquement en raison de la présence des groupes armés et/ou
criminelles. Conçu dans un cadre multi-acteurs et
interagissant et privilégiant une approche spécifique, elle est, de fond, un
élément d’une stratégie globale de réduction des violences communautaires ayant
comme vecteurs et facteurs de fond l’extrême pauvreté, précarité et d’autres
aléas humains majeurs.
Le DDR dit RVC [6] répond à des
caractéristiques et à des spécificités internes de la violence dans des unités
géographiques où la stratégie formaliste de DDR se révélerait inefficace pour
adresser les problèmes fondamentaux de sécurité et de stabilité dans un
contexte d’effort de la communauté internationale pour appuyer un pays à
résoudre des problèmes de conflits. Certaines critiques soutiennent,
généralement, d’un résultat mitigé des programmes nationaux de DDR en matière
de réelle assistance à la réinsertion et à la réintégration des ex-combattants,
la récolte effective et ordonnée des armes illégales en circulation. Certes, nous n’en discordons pas avec cet avis,
mais un fait est certain, il faut cadrer les interventions aux contextes et
aléas systémiques, incluant la conceptualisation desdits programmes, le mode
d’appropriation au niveau local, les conditions d’agir des parties,
c’est-à-dire : décideurs, intervenants, société civile, bénéficiaires et
institutions de suivi. Ces considérations sont autant valables tant pour les
programmes de DDR classique que ceux appelés Programme de Sécurité
Communautaire (PSC) et les secondes génération dites Réduction de la Violence
Communautaire (RVC/RVC). Notons que ce dernier programme s’ambitionnait de
porter un appui afin de compenser le déficit de service observé et de se
focaliser des facteurs déterministes de la violence armée.
Vu
les visages
nouveaux sous lesquels se présentent les conflits dans le monde l’innovation
des stratégies visant la sécurité communautaire ou la réduction de la violence
communautaire à travers des de Désarmement, Démobilisation et Réinsertion (DDR),
conjugué de stratégie de réduction de l’extrême pauvreté et précarité humaine est
une bonne chose. Voilà pourquoi nous estimons qu’il est important d’analyser
les injonctions, les inconvénients et les risques de telles tendances. Ce qui,
sans doute contribuera, à rendre plausible les forces, faiblesses, risques et
opportunités de ce nouvelles tendance et aussi aider à avoir un bon niveau
d’information et une vraie
motivation, de dégager une bonne vision afin de rendre l’approche plus efficace
et plus efficiente.
Nous
voudrions indiquer que nous notre réflexion est particulièrement une
perspective RVC/RVC puisqu’elle est au paravent des autres stratégies
subséquentes, y inclus les Programme de Sécurité Communautaire. (PSC), quoique
initié dans un cadre d’action conjointe [7].
V.
EN GUISE DE CONCLUSION
Nous
voudrions indiquer que cette réflexion et celles qui s’ensuivront dans les
trois autres articles, à paraître dans le même canal, n’ont pas la prétention
d’être complet. Mais l’utilité principale recherchée est de soulever un vrai
débat, réunissant, non seulement praticiens, mais aussi des gouvernants /
décideurs, bénéficiaires, des acteurs de la sociétés civiles sur la posture que
doit avoir un vrai programme RRSVC de type PSC et ou de RVC. Il s’agit donc de
susciter un regard critique sur ses pratiques afin de raffiner la théorie
d’intervention et d'encourager les décideurs, les praticiens et les bénéficiaires
à construire ensemble la pédagogie d’identification des écarts dans leur
programme, de déterminer eux-mêmes les réponses appropriées et de les
implémenter.
Le cas de
l’avènement des programme RRSVC est riche d’enseignement sur cette approche de
réduction des risques de sécurité et de violence communautaire. Car, il a
permis d’abord aux acteurs de reconnaître que les solutions classiques et
mécaniques ne sont pas toujours potables sans adaptation aux contextes d’un
autre environnement ayant ses caractéristiques sociologiques propres du conflit
c’est-à-dire une approche localement adaptée à la dynamique poli- tique,
sociale et économique de communautés. Il a mis en exergue la nécessité de
disposer d’indications sur les motivations et les intérêts sous-jacents qui
caractérisent la détention et la manipulation des armes dans le conflit, nombre,
la répartition des armes illégales à travers les groupes et clans afin
d’adapter la stratégie à les faire sortir de la circulation, le profil de leurs
utilisateurs, afin de pouvoir leur fournir les services appropriés soit en
termes de d’intégration / de réintégration ou de service de sécurité.
Enfin, nous
voudrions signaler que dans cette partie nous n’avons pas jugé les résultats
obtenus dans les programmes RRSVC implémentés dans le pays. En dépit de notre
reconnaissance de la viabilité de l’approche en termes d’intention pour adresser
la question de l’instrumentalisation de la pauvreté économique et spirituel
(dans le sens éducatif et psychologique du terme) il est un fait que de telles
initiatives n’ont pas apportées les résultats escomptés pour plusieurs raisons
que nous révélerons dans les parties suivantes.
Pourquoi la RRSVC est un bon outil de
stabilisation et de sécurisation communautaire ? c’est ce que nous verrons dans
la deuxième partie de notre réflexion en nous appuyant sur les
dispositions fondatrices de la pratiques et la définition élargie du concept de
violence
VI.
NOTE ET REFERENCES
(1) La notions attitude flibustière est assimilée au comportement des pirates français du temps de la colonie de Saint-Domingue qui ne faisaient que d’attendre en haute mers les cargaisons partant de la colonie vers la métropole afin de les détourner vers leur repaire. Non seulement c’est un comportement d’antivaleurs, c’est surtout un rapport de gain illicite et de perte sèche.
(2) Ce terme n’implique pas pour autant l’existence d’une classe bourgeoise en Haïti. Car, en dehors du fait de la détention de la richesse du pays, il n’existe au niveau de cette classe aucune autre caractéristique sociologique de la définition de la bourgeoisie. Cependant, sans en prendre la défense, il faut reconnaître que divers autres facteurs ont contribué à ce type de maquettage non bourgeois de la classe possédante que les politiques eux-mêmes en sont responsables. On peut indiquer par exemple, la réduction du comportement au rôle de simple marchant, grossiste de cette classe évitant toute investissement dans la production nationale, justifié à tort ou à raison par l’absence de garantie des investissements dans le pays. Donc, l’attitude de mercenariat de la classe est une conséquence des inconséquences de la classe politique et intellectuelle qui n’ont pas rationnellement au moment qu’il n’était pas nécessaire de mettre le holà à la pratique « Koupe tèt, boule kay. Car cette pratique après l’indépendance n’a que faire appauvrir le pays et créer la dépendance externe.
(3) Robert Muggah, « Haïti : Les chemins de la transition – Étude de l’insécurité humaine et des perspectives de désarmement, démobilisation et de réintégration », Small Arms Survey Institute, Institut Universitaire des Hautes Études Internationales, Genève, 2005.
(4) Jean Laforest Visene de Lyvia Tulce, “ To seeking philosophy and ideal schemes of the DDR second génération / community violence reduction programme ”, Vendredi 12 mai 2017; https://visenejl.blogspot.com/2017/05/to-seeking-philosophy-and-ideal-schemes.html;
(5) Moritz Schuberth le nomme carrément “ armed violence reduction and prevention (AVRP)”. Il a indiqué que l’AVRP englobe à la fois la réduction de la violence et la prévention de la violence. Un tel programme met l’accent sur les causes socio-économiques de la violence, sur l'identification des facteurs de risque «qui contribuent à augmenter la probabilité qu'un individu commette un acte violent» et des facteurs de résilience «qui aident les individus dans des circonstances défavorables à surmonter l'adversité et à éviter la violence» Lorsque ces deux ensembles de facteurs ont identifiées, indique - t ’il, les interventions ciblées peuvent être axées sur la réduction des risques afin de prévenir la survenue de la violence armée. Voir son article intitulée “Disarmament, demobilization and reintegration in unconventional settings: the case of MINUSTAH’s community violence reduction” in INTERNATIONAL PEACEKEEPING, 2017, VOL. 24, NO. 3, 410–433, http://dx.doi.org/10.1080/13533312.2016.1277145; https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.1080/13533312.2016.1277145?needAccess=true
(6) De manière générale le cadre d’une stratégie Réduction de la violence communautaire est extrêmement large. Car la violence communautaire inclus tous les sous-types des catégories des violences interpersonnelles et collectives englobant les formes de violence exercées de gré ou de force, structurelle ou endémique, fondées sur des inégalités des pratiques discriminatoires. Elle peut contenir la maltraitance des enfants, la violence exercée par le partenaire intime, la maltraitance des personnes âgées observées comme des pratiques collectives ou celle des membres de la famille, la violence des jeunes, les viols et les agressions sexuelles ainsi que la violence en milieu institutionnel.
(7)
Faudrait-il préciser
que le sigle RVC n’est pas à confondre dans le texte avec ce qu’on appelle dans
plusieurs pays « Commission Vérité et Réconciliation » ou ce qu’on
appelle « Cave à vin réfrigérée » qui ont aussi le même
sigle : « RVC ».
Professeur Jean Laforest Visene de Lyvia Tulce
JLV@L.T
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