dimanche 6 novembre 2016

Intégration d’Haïti dans l’Union Africaine : Les En-dehors-internes sociojuridiques de cette démarche


Intégration d’Haïti dans l’Union Africaine :
Les  En-dehors-internes sociojuridiques de cette démarche

Par Jean Laforest Visene

A la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de l’Union Africaine qui s’est tenue à Addis-Abeba, le 1er février 2012, Haïti, alors, membre observateur, avait formulé la requête de devenir membre associée, à part entière, de l’Union africaine. La première République noire indépendante de l’Histoire mondiale a obtenu le statut d’Etat Associé en février 2015, mais pas un statut de membre de l’Union Africaine au même rang que les pays membres situés géographiquement dans l’aire du continent Africain et bénéficiant les mêmes avantages et privilèges.

Des observateurs et chercheurs croyaient que la demande d’Haïti allait être abordée à la dernière session de l’UA qui s’est tenu en  2016.  Malheureusement, cette question n’a pas été au menu de l’agenda de l’UA. Il semble qu’Haïti n’a même pas fait de suivi à ce sujet, si ce dossier n’est pas tombé aux oubliettes des dossiers de la diplomatie haïtienne. Accommodement diplomatique pour raison d’Etat, passation de dossier maladroit puisqu’il a eu changement dans les reines de la diplomatie haïtienne, calcul stratégique ! Nous nous intéressons peu à connaitre les vrais raisons de ce manquement de la diplomatie haïtienne à ce sujet.  

Toutefois nous avons estimé nécessaire d’explorer le bienfondé et de l’audace de la démarche d’intégration d’Haïti dans l’Union africaine au titre d’Etat associé, à part entière. Cette étude qui est en cours d’Edition ayant pour titre : « Intégration d’Haïti dans l’Union Africaine : Les en-dehors-internes sociojuridiques de cette démarche» permettra à l’intéressé d’avoir une compréhension de cette porte-folio que la diplomatie haïtienne devait soutenir en raison de son importance pour le progrès socio-économique et de la quête d’une plus grande autonomie d’action du pays.

Faut-il comprendre que la démarche est évocatrice puisqu’il s’agit d’un cas hors-normes et inédit : Un pays en dehors de l’Afrique souhaitant intégrer dans une entité, qui, dans la lettre vulgaire, serait réservée aux pays du continent.

Ce travail couvre trois thématiques, ci-dessous formulée sous forme d’approche de la question d’intégration d’Haïti dans l’Union Africaine (UA) :

·         La première thématique est le qualificatif de l’intégration de la République d’Haïti dans l’Union Africaine. Pourrait-elle être interprétée, simplement, à un acte de reconnaissance de l’appui d’Haïti à la cause Africaine au travers des vitrines des relations internationales ou pourrait-elle être motivée par un génome culturel et affectif entre Haïti et l’Afrique ?

·          La deuxième thématique est l’intérêt de cette intégration tant pour la République d’Haïti que pour les Etats africains. Offrira-t-elle plus d’opportunités de coopérations économiques et plus de forces dans la défense des intérêts des concernés  au niveau des vitrines de relations internationales ?

·         La troisième thématique est la qualité juridique de la République d’Haïti pour être admise au sein de l’Union Africaine. Est-il possible dans la norme juridique actuelle qu’Haïti soit accepté comme membre à part entière de l’Union africaine ? Si non, qu’est-ce qui doit être fait pour y parvenir ?

Voilà pourquoi quand nous évoquons dans le titre de notre travail le concept « En dehors-interne » nous faisons référence à trois aspects fondamentaux du domaine du Droit en matière juridictionnel, à savoir : La qualité, l’intérêt et l’instance.

En effet, l’admission de la république d’Haïti peut être assimilée à celle de l’admission des Etats-Unis au sein de l’Organisation Trans-Atlantique Nord (OTAN). Logiquement, l’OTAN devait réunir que de pays du continent européen. Cependant, pour des raisons stratégiques et  de bonne amitié, les Etats Unis y ont été admis.

Certes, Haïti ne pourra pas être admise au sein de l’Union Africaine parce qu’elle représente une force comme le sont les USA, mais elle semblait avoir  témoigné de son amitié avec le continent africain dont elle est, pour certains, une digne héritière et représentante dans les Amériques. Le fait notable de cette comparaison est que les deux pays, les USA et Haïti, intégreraient une organisation à caractère continental, dont le privilège d’intégration est l’appartenance au continent. Or, tous deux ils se situent en dehors des frontières géographiques de ces continents.

Ce travail ne prétend pas faire l’apologie des relations internationales d’Haïti. Mais, il cherche à investiguer certaines questions afin de comprendre la  rationalité sous-jacentes à cette intégration et le capital qu’elle est porteuse pour les concernés et plus spécifiquement pour la République d’Haïti.

Couplant cette recherche entre le domaine du Droit (D) et le domaine des Relations Internationales (RI), ayant comme sous-disciplines tampons : Le droit internationale et la coopération internationale, l’emphase est mise dans ce travail sur trois questions fondamentales, à savoir :

a)      Qu’est-ce qui pourrait valoir cette admission à Haïti au sein de l’union Africaine ?

b)      Quelles seront les nouvelles ouvertures de coopération qui s’ouvreront à Haïti par cette admission ?

c)      Quelles sont les pôles de coopérations les plus rationnelles qu’Haïti pourrait opter afin d’être efficace, efficient et renforcer ses liens avec les pays africains et aménager ses rapports avec d’autres grands acteurs internationaux ?

Ces interrogations sont, en fait, les points fondamentaux de cette recherche, qui n’est pas exhaustive.

Le rapport de la recherche est divisé en six chapitres. Ci-dessous, nous présentons la topographie des chapitres.  

Chapitre I. Méthodologie de la recherche : Dans ce chapitre nous avons présenté le problème de la recherche, les théories explicatives et compréhensives du problème de la recherche, le caractère épistémologique de notre démarche d’enquête incluant les outils de collecte, d’analyse et d’interprétation des données, ainsi que les limites de l’étude.

Chapitre II. Présentation de la République d’Haïti : Ici, nous avons présenté la configuration socio-spatiale de la république d’Haïti, des aspects historique, économique et culturels, incluant ses forces / atouts et ses faiblesses. Ce chapitre est le pré-plaidoyer de la défense de la requête d’intégration d’Haïti dans l’UA.

Chapitre III. Représentation diplomatique d’Haïti au niveau mondiale : Dans ce chapitre nous avons tentée de faire un essai de compréhension de la représentation diplomatique de la République d’Haïti par rapport à ses intentions et ambitions d’intégration de l’Union Africaine. Cet exercice nous a permis de comprendre la réalité de représentation diplomatique d’Haïti au niveau mondiale et de formuler des recommandations de refonte de cette représentation eut égard aux intentions et ambitions déclarées.

Chapitre IV. Faits et évènements marquants des relations internationales entre la République d’Haïti et l’Afrique : Ce chapitre a permis de mettre en évidence le combat que la République d’Haïti a mené au niveau international en faveur de l’Afrique. Cette curiosité nous a permis d’aboutir à l’interprétation du sens de la magnanimité des pays africains qui accepterait l’admission de la République d’Haïti au sein de l’Union Africaine.

Chapitre V. Opportunités de l’admission de la République d’Haïti au sein de l’Union Africaine (UA) : Au niveau de ce chapitre nous explorons les atouts que dispose la République d’Haïti afin de faire de cette admission une fenêtre d’une autre forme de représentation diplomatiques et de coopération internationale.

Chapitre VI. De la charte fondamentale de l’Union Africaine  (UA) : Dans ce chapitre présentons la charte de l’Unions africaine afin de cerner les forces et de faiblesses de ce cadre juridiques dans le souci de déterminer les éléments de stratégie de soutenance de la démarche d’intégration d’Haïti dans l’Union Africaine.

 Chapitre VII. Conclusions et Recommandations : Enfin, ici, situant les relations internationales dans le domaine des sciences normatives (1). Nous fournissons des avis rationnels pour des actions immédiates de la mise en œuvre de cette intégration.
 
Les conclusions de l’étude montrent qu’Haïti a, tant la qualité, que l’intérêt et l’instance pour souhaiter être intégrée dans l’Union Africaine. Il y est ressorti aussi que les décideurs politiques d’Haïti ont les moyens juridiques pour soutenir leur requête d’intégration, à part entière dans l’UA.  Le travail conclu que les caractéristiques anthropologiques, les liens socio-historiques, diplomatiques aussi bien que les affinités culturelles et humaines qui existent entre Haïti et l’Afrique constituent un paravent sociojuridique fort en faveur de l’intégration, à part entière, de la République d’Haïti dans l’Union Africaine.

De plus, l’attache et la rayure anthropomorphique d’Haïti sont tellement fortes que nulle ne pourra, par effet de composition avec d’autre civilisation, défaire le pays de son africanité qui saute aux yeux des observateurs. C’est avec raison qu’Amadou Mahtar l’a caricaturé ainsi dans ses propos élogieux à l’haïtiannité lors d’un colloque de l’UNESCO à l’occasion du bicentenaire de l’indépendance d’Haïti : « Les africains devaient considérer l’histoire de la révolution haïtienne comme une partie intégrante de leur histoire et s’efforcer de la mieux connaitre. Longtemps après, dans les mornes d’Haïti, et sans doute aujourd’hui encore, nombreux sont les paysans haïtiens qui pensaient qu’après leur mort, leur âme détachée du corps retraverse l’océan pour aller reposer en paix sur la terre -  mère d’Afrique  ».

Nous estimons que l’intégration, à part entière, de la République d’d’Haïti dans l’Union africaine pourrait renforcer davantage les liens de coopération au développement et de commerce extérieur entre l’Amérique et l’Afrique. Haïti sera le principal bénéficiaire puisqu’elle pourrait devenir un pôle de composition de l’action de coopération et de développement entre les intéressés. Les hommes d’affaires haïtiens auront l’opportunité d’attirer en investissement associatifs leurs pairs des deux continents.

En dépit du bien-fondé de cette démarche, nous avons terminé notre ouvrage en évoquant quelques questions importantes qui, certainement, sont importantes pour le suivi de cette porte-folio de la diplomatie haïtienne. Quelle est le protocole afférant à la démarche d’intégration d’Haïti dans l’Union africaine ? Quelle sont les principaux obstacles à cette intégration ? Quels sont les risques associés à une éventuelle intégration d’Haïti dans l’Union africaine ? Ces questions pourraient être traitées dans la prochaine édition si le besoin demeure.

 Notes
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Les disciplines des sciences sociales et/ou sciences humaines sont catégorisées en trois groupes : les sciences positives, les sciences normatives et les disciplines spéculatives. Notons que celles qu’on qualifie de sciences normatives sont celles dans la finalité est l’application. De ce fait, elles produisent des prescriptions même si ses recommandations ne sont pas contraignantes. Pour plus de détails voir www.visenjel.blogspot.com sur lequel vous trouverez deux articles qui approfondissent ces trois catégorisations. Le premier article est : «  Le jugement à travers le discours » ; le deuxième est : «  Le sociologue haïtien entre la neutralité axiologique et l’activisme social ».

 Jean Laforest Visene
Sociologue, MA Sc. Dev.
Professeur à l'Université d'Etat d'Haïti
Sociologue, M.A. Sciences du Développement
Membre fondateur du Collectif Educa-Dev (COED)
Email:
visenejl@gmail.com 
http://www.visenejl.blogspot.com