vendredi 20 décembre 2013

Gestion responsable des munitions périmées ou hors d’usage : Une obligation pour la protection des communautés et des usagers du secteur de sécurité


gestion responsable des munitions périmées ou hors d’usage :
Une obligation pour la protection des communautés et des usagers du secteur de sécurité

 .- Par Jean Laforest Visene

Les munitions et d’explosifs non utilisables ou expirés constituent un problème de sécurité publique dans la perspective d’une stratégie de développement communautaire. Pour cela, ces matériels doivent être gérés, puis détruits pour éviter leur effets dévastateur, tout au moins, pour diminuer leur impact négatives tant sur la vie des professionnels du secteur de sécurité que sur celle des populations avoisinantes.

Selon Richard Boulter, Conseiller principal de l’unité de la gestion des armes et des munitions du Service de la lutte anti-mines des Nations Unies (SLAM/UNMAS) (1),  « Le procédé de destruction par explosion contrôlée permet de minimiser les impacts environnementaux et d’éviter la pollution et les dangers liés à l’enfouissement à terre ou en mer des munitions obsolètes». Donc, la gestion des munitions et des explosifs non utilisables ou périmés revêt à la fois un aspect de sécurité humaine, de protection de l’environnement et indirectement d’économie. Le tout se résume au conditionnement du développement durable.

1.    Etapes des opérations de destruction des AMLPC
 
Quelle sont les étapes pour la destruction des munitions et d’explosifs non utilisables ou expirés ? C’est à cette principale question que ce papier tient à répondre. Pour y parvenir nous nous referons à des documents d’experts et aussi à un communiqué de presse (Réf : PIO/PR/501/2013)  de «  Public Information Office (PIO) » de la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti (MINUSTAH) qui relate une récente opération de destruction de munitions et d’explosifs de concert avec la Police Nationale d’Haïti (PNH).

 La destruction des munitions et des explosifs que l’on appelle « Operations pyrotechniques »  pour les Armes et Munitions Légères et de Petits Calibres (AMLPC) (2) s’étalent, pratiquement, sur huit étapes. Ce sont :

1ère étape : Activités de préparation et/ou évaluation du site. Dans certains pays où il n’a pas de culture du processus de destruction des armes et munitions, il n’y a pas de terrain techniquement préparé pour ce type d’opération.  Même quand il en existerait il est de mise de faire une vise de prospection avant l’opération pour s’assurer que le terrain est et les dispositifs sont en états pour cette opération;
 
2ème étape : Opérations de sensibilisation et d’information de la population de la zone  (3).

3ème étape : Etablissement d’un cordon de sécurité Cette étapes est pérenne jusqu’à la fin de l’opération ;

4ème étape : Préparation des fosses  ou fourneaux que j’appellerai « caisses terriennes de détonation » ;

  5ème étape : Transport sécurisé des munitions ;

6ème étape : Remplissage des caisses terriennes de détonation avec des munitions à détruire. C’est un moment très crucial car l’ouverture des caisses et le déversement des matériels à détruire peuvent provoquer un choc non négligeable.

7ème étape : Démolition des munitions et explosifs ;

  8ème étape : La remise en l’état immédiate du terrain, qui inclue le ramassage d’éventuels débris et le rebouchage des fosses, ainsi que l’inspection du site avec les autorités ;

 Nous ajoutons une autre étape que l’on peut considérer comme ex-ante et post opération c’est l’établissement de la liste exhaustive de chaque munition détruite. Cela permettra de garantir la traçabilité des stocks et la sécurité de leur gestion (4). 

2.    Importance de la destruction des AMLPC pour les communautés

 Pour reprendre les termes  de la porte-parole de la MINUSTAH, Sophie Boutaud de la Combe, « La destruction contrôlée des munitions obsolètes est le meilleur moyen de lutter contre le trafic illicite de munitions et de sécuriser la vie des personnels de sécurité et de la population ». Selon le communiqué de presse la destruction de munitions conventionnelles obsolètes est un élément clef de la bonne gestion des stocks de munitions car celles-ci pourraient présenter un danger à l’usage ou au stockage.

La destruction des munitions et explosifs doivent être conduite par des professionnels compètent. Dans les fosses ou les caisses de détonation on doit s’assurer que leur capacité de contention n’’aient pas été dépassées (5). Il faudra aussi une définition nette et claire des taches de chaque manipulateur et que leurs actions soient, temporellement, bien coordonnées. Les responsables de l’opération doivent identifier les risques et mettre en œuvre les moyens de prévention et de protection adaptés.

Notons que parmi  les munitions détruites, lors de l’opération ci-dessous mentionnées, figurent des munitions létales et non létales et explosifs, tels que des balles de pistolet ou de fusil, y compris des munitions saisies par la PNH, ainsi que des grenades  utilisées dans le cadre des opérations de maintien de l’ordre et de maintien de la paix.

3.    A quand la fin des risques AMLPC pour les communautés

 Il est un fait que le problème de la sécurité humaine, est beaucoup plus global que la référence à la gestion responsable des munitions et des explosifs périmés et qui sont dans une certaine mesure repérable à travers les institutions formelles de contrôle. Ce problème est tributaire du trafic illicite des Armes et Munitions Légères et de Petits Calibres, mais aussi de l’usage passé et présente des armes à munitions et à sous munitions (6).

Selon Handicap International, plus de 80 pays détiennent actuellement plusieurs milliards de sous-munitions et 15 pays ont utilisé des armes à sous-munitions dans plus de 30 pays et territoires de par le monde120. L’institution indique que les États-Unis à eux seuls, possèdent un stock de plus de 700 millions de sous-munitions et, lors de la guerre du Vietnam, ils ont laissé près de 20 millions de sous-munitions non explosées dans le seul Laos (7). Quant à la Russie elle possède son arsenal d’armes à sous-munitions est moins d’être moins inquiétant.  

En gérant de manière responsable les munitions et explosifs périmés ou hors d’usage on contribue à maintenir la triplicité vitale du développement : Protection de l’être humain (agent de développement) protection de l’environnement  et diminution des risques économiques. Il est d’une obligation juridiques et même morales des Etats de garantir cet aspect de la sécurité humaine (SH). D’autant plus que l’irresponsabilité dans la gestion de ces matériels peut être un obstacle à l’aide au développement, aux opérations d’urgence et pourraient faciliter le développement du crime organisé.

 Notes de référence

(1)Le SLAM/UNMAS est fondé en 1997. Il est chargé de la coordination des efforts à l'échelle de l'ensemble du système des Nations Unies pour éliminer les mines terrestres et les munitions non explosées et atténuer leur impact sur la vie quotidienne.

(2)   La convention de l’Afrique Centrale pour le contrôle des Armes Légères et de Petits Calibre, de leur Munition et …  (Nations Unies 2010) définit une Arme Légère comme une arme collective conçu pour être utilisé par deux ou trois personnes. Quoique, non exclusivement, qu’elle puisse être transportée par un seul homme. Au nombre des Armes légères figurent : les mitrailleuses lourdes, les lances grenades, les canons antichars portatifs, les fusils sans reculs, les lances missiles et les lances roquettes antichars portatifs, les lances missiles antiaériens portatifs, et les mortiers d’un calibre inferieurs à 100 millimètres. Une arme de petit Calibre est celle qui est destiné à l’usage personnelle. Comme les revolvers, les pistolets à charges automatiques, ou semi-automatiques, les fusils et les carabines, les mitraillettes, les fusils d’assaut et les mitrailleuses légères.  Quant aux munitions il s’agit de l’ensemble des cartouches ou l’ensemble de ses éléments y compris les étuis, les amorces, la poudre propulsive, les balles ou les projectiles utilisés dans une arme à feu.

(3)  Les communautés avoisinantes doivent être informées de l’opération surtout dans des zones ou la situation sécuritaire n’est pas au beau-fixe. Car, des membres de la communauté en entendant les explosions peuvent être frappés de panique. En ce qui concerne la sensibilisation, elle permet de leur faire comprendre les enjeux sécuritaires, en particulier pour le non attroupement des membres de la communauté à proximité des lieux de l’opération. On doit également inclure des aspects relatifs aux résidus des matières détruites qui peuvent être non évacué des lieux non sécurisés.

(4) La convention de l’Afrique Centrale, Op. Cit., fait exigence aux états signataires de la convention de conserver les informations relatives à la traçabilité des matériels détruits dans leur base de données  électroniques pour une durée minimale de 30 ans (Réf. : page 16, Article 15, §4).

(5)   Voir Beine Nauroy (Marne), Explosion lors de la destruction de munitions Le 21 mai 1996, ARIA, N° 8886.
(6)   Handicap International dans un article ayant pour titre « Mali : Détruire les restes explosifs de guerre » rapporte que dans ce pays les armes abandonnées par les forces qui étaient en conflit font des dégâts. Par méconnaissance, les populations s’exposent parfois à un danger réel sans le savoir. L’institution rapporte qu’au mois de juin 2013, un berger a trouvé une roquette et il a eu le mauvais réflexe de la ramener chez lui. Ses enfants ont joué avec et elle a explosé tuant l'un d'entre eux âgé de quatre ans seulement. Quatre autres enfants ont été blessés ». http://www.handicap-international.fr/je-minforme .
 
(7)   Bérangère Rouppert, la convention sur les armes à sous-munitions : un état des lieux, Groupe de recherche et d’information sur la paix et la Sécurité (GRIPS), Bruxelles, 2009, page 21.
 

Jean Laforest Visene
                                                                        Sociologue, MA Sc. Dev.
                                                                        Professeur à l'Université d'Etat d'Haïti
                                                                        Sociologue, M.A. Sciences du Développement
                                                                              Email: visenejl@gmail.com 

                                                                        http://www.visenejl.blogspot.com