vendredi 9 octobre 2020

Au-delà du phénomène «block / lock» dans l’Haïti vielle de 33 ans de démocratie

 Depuis plus d’un mois, Haïti est en train de vivre un nouveau virement dans la crise haïtienne, initialisée depuis juillet 2018. Originellement, c’est un mouvement de protestation collective, dont des jeunes assuraient la guidance et réclamant la tenue du procès Petro-Caribe. Le politique s’est faufiler, petit à petit, dans la direction du mouvement, jusqu’à vouloir éclipser la marque des petro-challengers. Il faut dire que la diffusion des rapports de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCCA) sur la gestion des fonds Petro-Caribe a été le moment intense de cette récupération.


Questionnement du paysage Haïti – route block / pays lock

Que peut-il y avoir au-delà du phénomène route block / pays lock, caractérisé par le « barricadage » des grands et petits axes dans les grandes et petites villes et parfois même en milieux rurales ? Des démonstrations en termes de protestations collectives, incontestablement, fourmilières, parfois, qui semblent avoisiner d’un million de participants ? Comment doit-on apprécier le fait que, pour la première fois, une crise politique met à nu la profonde division dans la classe des grands commerçants du pays (appelée injustement classe bourgeoise) ? D’un côté, ceux qui s’attachent au maintien de Mr Jovenel Moise au pouvoir, de l’autre côté, ceux qui veulent sa tête. Que dire des récents bras de fer entre le pouvoir et des entreprises éclectiques, dont leur propriétaire sont parties affichées aux protestations collectives en cours ?  Notons que le bras de fer se fonde sur la qualité des services que ces dernières sont supposées fournir à l’EDH en termes de quantité de mégawatts sur son réseau. Si on admet le principe classique d’intrigue permanent entre parti au pouvoir - ses alliés et partis adverses, doit-on lire dans le phénomène route block / pays lock et le semblant riposte en cours, comme des tentatives de l’un ou de l’autre, de démonstration de leur force, de la quête de l’opinion et de l’assentiment populaire ?

Permettez-moi de vous avouer que j’estime que la crise haïtienne actuelle est normale au regard des ingrédients de la totalité haïtienne. N’est-il pas admis que : « Sa w plante se sa w rekòlte ». Pour reprendre l’esprit du discours de Robert K. Merton, la crise haïtienne est une autoréalisation du système haïtien. Les vecteurs et les facteurs de la crise s’émergeaient depuis la fondation du pays. Puis, leur effet, dans la même direction, se sont intensifiés avec de nouvelles configurations sociologiques de la société haïtienne et la systématisation de certains habitus économiques de prédation et de mystification de l’autre. De ce fait, la crise ne peut pas être comprise et traitée en dehors de la totalité que représente la société haïtienne actuelle, le fait haïtien et les modes d’interactions et de réalisations des acteurs par rapport à leurs intérêts.

Est-il possible de profiter de cette présente crise pour poser les jalons d’une rupture avec des habitus économiques de prédation, des modes de mystification de l’autre et des manières de composition cyniques de la classe politique, du comportement réactionnaire de la classe intellectuelle et d’une frange de la masse haïtienne ? Par ailleurs, le cycle permanent de violence en Haïti, n’est-il pas symptomatique des séquelles esclavagistes, des problèmes émotionnels générés, jamais identifiés ou guéris et qui seraient les prédispositions au déclic de heurts et déchirements internes ? Est-il aussi possible de profiter de la crise pour assurer une refondation des bases de la gouvernance politique et administrative du pays ?

Le registre d’inscription d’Haïti

ZAFEM un nouveau groupe musical de rythme compas, nous permet de planter le décor de la crise politique qui frappe le pays. Avec un Reginald Cange de grand art et l’excellent Maestro Dener Ceide le groupe vient de faire sortir son premier vidéoclip titré « Savalou ». C’est une musique exceptionnelle, au point la considérer comme une virtuose griot. Je me permets de choisir certains extraits qui, certainement, permet d’inscrire Haïti dans un registre. Je choisis de les livrer sans commentaires particuliers.

“ Savalou wi mes chères citoyens 
Sa kap pran ak sa k pa di anyen 
Madoulè a la nan tout rakwen 
Ou ka vle inyore l, kanpe lwen l 
Li fin ta n ap di l bonè 

Nan gran ravin sou bwa geto yo toujou g on men 
K ap manipile 
Nèg ki lekòl k ap kenbe galil nan men l 
Nan bidonvil Ayisyen ap viv an ekzil 
Nan pwòp peyi l 
Otorite w pa ka pran pwòp pèp ou kòm lenmi w 
Ou la pou sèvi l

Ayisyen, nou gen moun ki te batay 
Ewo nou yo pat batay pou sa 
Pou n pat konsa jann ye la 
Ewo nou yo pat batay pou sa

Pa wè ou pa wè 
W ap fè kòmsi w pa wè – e w konte kòb chak jou 

Lajistis toujou pi prese pou trase lekzanp sou malere 
Men mèt afè a ap byen sikile se yo k pi gwo privileje 
Yo fin pran epi y ale san yo pa negosye 
Peyi sila ap viv kou òfelen nan mitan yon bann gwo je

Sa fè kèk tan la n okipe men sanble sa pa deranje 
Frè nou yo nan gouvernement, sa yo k nan gran pozisyon 
Pifò vle pran epi y ale san yo pa negosye 
Peyi sila ap viv kou òfelen nan mitan yon bann gwo je

Sispann jwe ak peyi a, jwe ak peyi a 
Sa nou wè yo bay dlo nan je 
Sispann jwe ak peyi a, jwe ak peyi a 
Lavi moun se bagay serye

Wi m ap di unissons nou pandan m konnen pami nou 
Gen sak pa janm dakò, yo ta prefere lanmò 
Men li ta bèl si kèk nan nou va chwazi defann peyi nou 
Pran richès nou ak fòs nou pou n sove lonè n 
Kilè rat kay va sispann manje pay kay

C’est dans un type de registre comme décrit, ci-dessus que s’inscrit Haïti : Un pays qu’on s’est tû trop longuement d’assister à son pillage, la dilapidation de ses fonds, donc se résigner sans mâcher mots ; Un pays habité par des plaisantins qui ne savent pas les enjeux de sa chose ; Se laissant manipuler de tout bord, alors que les autres avancent vers leur but ; Pour eux, il est encore tôt, donc on peut continuer à bambaner avec les choses profondes, nées des rêves des pères fondateurs de la patrie ; Un pays pris en otage par des flibustiers qui le considère seulement comme un butin à conquérir, pour aller jouir ailleurs ; Un pays où les dirigeants considèrent son propre peuple comme son ennemi et tout comme les grands commerçants et politiciens « k ap paweze nan gwo lajan, yo pa janm wè ti pèp la nan linèt  yo »; De fait, au lieu d’offrir le pain de l’instruction aux enfants haïtiens on les contraints à servir comme hommes de mains ; Un pays où le citoyen, héritier des pères fondateurs de l’indépendance d’Haïti se sent en exil sur son propre héritage ; De fait, il le fui pour se réfugier au Chili, au Brésil, au Canada, aux autres Antilles, en Afrique et ailleurs; Un pays où la justice « se dan pouri ki gen fòs su banann mi ». Au lieu d’arrêter les grands voleurs, les grands malfaiteurs qui sont les principaux responsables de la misère du peuple, ce sont les déshérités, les faibles et sans réseaux qu’on persécute, arrête et tue.

Un tel décor ne peut que donner lieu à un pays séquencé par des cycles de violence, certes, d’une capacité de résilience en énorme. C’est un pays qui recommence à chaque évènement.  Un pays qui retient son souffle pendant un court laps de temps après des crises, en attendant la prochaine crise. C’est un pays dominé par deux sources majeures de la violence : la violence provoquée par des phénomènes naturelles et la violence causée par la main humaine, dont les unes sont les plus aiguës que les autres. Mais c’est aussi un pays habité par un type d’haïtien combattif, survivant et croyant en un avenir meilleur, jusqu’à ce que refroidisse son espérance par la prochaine crise. Une jeune visiteuse française, observant la combattivité des marchands de rue, des jeunes vendeurs sur le réseau routier du centre urbain de Port-au-Prince, leur engagement dans ce qu’ils font, s’exclama : « Ce sont ces gens, qu’on m’a fait savoir, qui sont des paresseux, des parasites, vivant aux dépens des autres ? J’avoue que chez-nous, on n’aurait jamais pu manifester la combattivité de survivre de que ces gens démontrent ».

Aujourd’hui, le pays est aux bords d’une crise humanitaire et sécuritaire sans précédent. C’est la première fois qu’on assiste à une telle incapacité interne à assumer la sécurité intérieure du pays ; aux risques pour la circulation intérieure des produits de première nécessité, ainsi que la livraison de l’aide humanitaire aux personnes vivant en situation d’extrême vulnérabilité et moins encore. C’est aussi la première fois qu’on observe l’extrême précarité de l’accès aux soins pour les personnes en situation d’urgence sanitaire. Les appels des familles et personnes en détresse, les cas reportés d’usage excessif de la force, les assassinats et tueries, témoignent aussi de la gravité de la situation. 

Nul ne sait combien de femmes enceintes et d’enfants, de blessés, de personnes âgées ou en situation sanitaire spéciale sont morts pour cause d’inaccessibilité aux soins sanitaires. Tout cela constitue des crimes de guerre dont les responsables devaient payer selon les conventions et résolutions internationales y relatives. Ce qui rend la situation plus inquiétante c’est la radicalisation des positions des acteurs en conflit, c’est-à-dire l’opposition politique et le pouvoir en place, dont son chef est scandalisé par des soupçons de corruption. Les deux camps évoquent la notion de système comme le fonds du problème, dont le parti au pouvoir indexe les gardiens du système comme ses principaux détracteurs. Existe-il vraiment un système ou des systèmes parallèles qui handicape une application d’une politique et d’une gouvernance administrative au bien-être des communautés haïtiennes ? Si oui, qui en sont les véritables maitres ?

De la systématisation la gouvernance politique et administrative d’Haïti

Qu’est-ce qu’un système et comment fonctionne-il ? Soyons simple et directe. Quand on parle de système on parle d’un ensemble, composé d’éléments, interalliés et fonctionnant suivant des mécanismes de coordination. Mais, en dehors de la mécanique considération d’un système comme une machine, il faut distinguer l’idéal de ce qui est pratiqué en réalité, ainsi que le fonctionnel de celui du but à poursuivre. En politique, je pourrai définir le système, dans le cas d’Haïti, comme l’ensemble intégrant les communautés de citoyens haïtiens dans l’exploitation des ressources suivant des principes transcrits à travers des règles (Constitutions, lois, décrets, ….) dont la gouvernance est assurée par des hommes à travers des institutions établies, des règles et procédures plus ou moins strictes. Il n’existerait pas de système, sans l’existence du social, de son contexte politique et sa structure (des groupes ayant des intérêts et des motivations). Du fait même de l’existence du social émerge l’économique et de son armature, la nécessité d’une forme d’organisation et de combinaison politique pour l’exploitation, et qui se réalise suivant des prédicats moraux et idéologiques. Ce qui confère une autre compréhension de la configuration et des sous-jacents de la dynamique système.

Existe-il un système en Haïti ? Sous la loupe de la logique de l’idéale politique le système n’existe pas, mais, le système existe au regard des prédicats juridiques, de la systématique de l’existence du social et de ses formes de fonctionnement et d’interactions internes. Cependant, se pose le problème de la qualité, du mode de fonctionnement et du rendement du système. Un système existe en Haïti. Ces systèmes se sont institués à “l’orée” de l’indépendance de la république d’Haïti. Il s’est accidentellement ou sarcastiquement handicapé par des acteurs intelligents, dans une continuation de la politique contre la révolution noiriste de 1804 sous fonds insoupçonnés de lutte inqualifiable, pour certains, sous fonds d’enjeux de l’indépendance de la première république noire du monde pour l’économie capitaliste occidentale.

Dans le pré carré et le sous-bassement de la lutte politique actuelle se trouvent des bénéfices et d’énormes privilèges de toutes sortes. Il est bon de souligner l’indéterminisme des luttes traditionnelles de classes (entre noirs et mulâtres) congénères hérités authentiques de la patrie haïtienne. On ne peut pas dire que l’idéologie mulâtresse et l’idéologie noiriste ne sont plus distincts, ou seraient conjoncturellement consensuelle face à cette nouvelle classe de bourgeois étrangers, qui ont dépossédés les bourgeois noirs et mulâtres de leur préséance dans l’économie haïtienne. 

Car, quand on parle de Pétion-Ville ses alentours comme cours symbolique du bourgeois haïtien. En disant : « Pitit Desalin pral ka Pitit Petion », on a une fausse lecture de la direction de l’économique haïtienne, laissant comprendre que ceux qu’on appelle traditionnellement les fils de Pétion, symbolisme de la représentation des mulâtres, co-fondateurs de l’indépendance haïtienne et des bourgeois noirs principaux bénéficiaires de la politique noiriste de Duvalier, sont toujours les maitres de l’économie haïtienne. On y voit plutôt des syriens, des Libanais, des palestiniens, des occidentaux (Tous les pays confondus) qui détiennent les rennes du commerce du pays.  Ainsi, la classe politique haïtienne affiche son incapacité à lire, interpréter et comprendre les transformations dans son décor politique. Sans qu’on s’en rende compte, là se pose une question de fond de la supériorité des races, laquelle est toujours debout dans les hautes sphères de la politique et du débat intellectuel au niveau international.

Comment se fait-il, en moins de quelques miettes de décennies, un petit groupe de migrants étrangers de race blanche et interalliés ait pu se propulser à la tête de la hiérarchie de classe économique et sociale haïtienne, possédant plus de 95% des richesses économiques du pays et occupant tous les allés stratégiques du pouvoir politique ? On dénonce, l’oligarchie traditionnelle, l’oligarchie traditionnelle, de quelle oligarchie qu’on parle ? Certains diraient qu’à l’intérieur, on est tellement figé sur le passé qu’on ne s’en rende pas compte du déplacement du problème. Cependant, d’autres y verront une continuation de la politique de mettre constamment les va-nu-pieds en face des gens à chaussures. Quel que soit l’interprétation ou la compréhension, le problème de l’intelligence et de l’extrêmement imagination des vaillants combattants de l’indépendance se pose à travers la manière que des hérités authentiques de la révolution de 1804 agissent sur la politique haïtienne. On peut même se poser la question, si on s’en rend compte qu’on est en train donner des arguments aux théoriciens gobinistes pour faire resurgir des doutes de la validité de leur fausse théorie de supériorité d’une race par rapport à une autre.

Certes, des scientifiques comme Antênor Firmin, à travers sa thèse de doctorat en anthropologie à l’Université de Sorbonne sous le titre « De l’égalité des races humaines » et d’autres études ont démontés les malicieuses opérations de démonstration de la supériorité d’une race sur une autre. Mais, il reste évident, que des situations d’effondrement de si grands rêves des sociétés nègres comme celui d’Haïti capital des valeurs de liberté et d’égalité, véritable démonstration de la fraternité entre les hommes, pose les jalons pour une résurgence de ces questionnements de classification raciale. Certes, même s’il n’existe pas dans les faits, mais il existe dans la tête et ils portent des énergies utiles à des causes contraires aux fondamentaux des droits et à l’égalité des conditions de la personne humaine, quelle que soit sa race.

De la transposition du mode de domination et de guidance de la gouvernance politique d’Haïti

La crise semble être plus profonde que ce que l’on peut percevoir sous le regard de clichés simplistes de différends entre riches et pauvres haïtiens, bourgeois Pétion-ville et la masses des déshérités, d’ici et d’ailleurs y inclus scission ou déchirement au sein de la classe possédante du pays et j’en passe.  Car, il faut regarder sa domination et sa guidance sous loup et de l’effet transformateur du temps. C’est ce que j’appelle « le processus de transformation de la main visible en main invisible ». 

En fait, les opposants au symbolisme de l’indépendance de la première république noire du monde arrivent à transposer dans le concret le phénomène de la possession d’un individu par un ou des forces surnaturelles et pire encore à la faire danser dans la tête de tout un nombre imposant d’individus dans un ensemble social aussi large qu’Haïti. C’est en fait un phénomène d’installation des déterminants dans environnement social qui vont s’ériger en système, une forme gouvernance automatique, à distance et aussi générant une télépathie à effet négatif et de réflexes favorables à l’excessive probabilité de la réussite des propositions des vraies forces dirigeantes de politique intérieure et extérieure du pays occultés par l’effet du temps.

Je dois faire observer aussi ce processus de transformation de la main visible en main invisible à travers des suppôts réels qui servent comme des pantins à un moyen de transmission de la commande et aussi comme moyen de mise en œuvre de la nouvelle perspective du monde. Elle dépasse davantage la force de frappe de la possession spirituelle classique, ce qu’on appelle les forces et domination spirituelles, y inclus les esprits des Loas dont l’haïtien originel y est intimement lié. En effet, tandis que la possession de l’individu par les forces spirituelles, comme le Loas, par exemple, est temporelle, celle instituée par les dominations humaines sont une possession permanente. Il faut indiquer aussi que le processus de désengagement est aussi plus compliqué dans le second et la renonciation devient quasi impossible sans une compréhension de ses modes et de ses attributs.

Dans les sous-jacents du conflit il y a des enjeux politiques (agenda et perspective par rapport aux prochaines élections), ainsi que des intérêts économiques de tailles. Tout cela fait en sorte que la main du Ciel (terme symbolique) est loin de pouvoir apaiser les heurts, parvenir à une conciliation et, pour le moins, ouvrir la voie aux discussions en perspective d’une résolution pacifique du conflit.

L’agir rationnel de la majorité nationale consciente 

Certains regardent la crise actuelle d’Haïti suivant une perspective négativiste de l’issue de la révolutionne haïtienne de 1804. Des haïtiens, avec qui je me suis entretenu, face aux conditions critiques d’existence du citoyen haïtien, de la pernicieuse déchéance de la praxis politique haïtienne, du bas-fonds dans lequel se trouve la réputation du pays au niveau international se questionnent sur le bien-fondé de l’indépendance acquise par les pères fondateurs de la patrie haïtienne. A mon avis, ce serait idiot de ne pas voir dans la crise des opportunités pour adresser des problèmes de fonds de la société haïtienne.

Quand je porte mon regard sur la tranche d’histoire d’Haïti de 1804 à nos jours, j’observe qu’il n’a jamais eu un congrès entre les haïtiens pour définir le projet haïtien, c’est-à-dire définir ce que l’haïtien voudrait bâtir comme société dans ce pays et établir les plans pour y parvenir. En fait, cela laisse comprendre qu’il n’y aurait aucun projet commun entre les haïtiens de quelque qualification qu’ils soient. Ce qui me porte à penser qu’il y aurait autant de classes sociales que de possibilité de projets haïtiens, pour de pas dire autant de propositions de projet que d’haïtien.

Dans un tel contexte de jeu d’acteurs politiques et économiques, apparemment opposés, mais de mêmes acabits, qu’elle devrait être la position de la majorité silencieuse et intelligente, historiquement héritière de l’indépendance haïtienne ? A mon avis, elle devait faire un effort de démystification de la crise et actionner la crise comme opportunité pour poser les bases d’une action systématique de défense de ses intérêts historiquement disparates des conflits entre les acteurs dominants du système politique et économique. 

De l’interprétation du phénomène « route block / pays lock »

Le phénomène « route block / Pays lock » est une manifestation d’une évolution dans la pensée politique haïtienne, de la conscience du citoyen de sa participation et de son pouvoir décisionnel dans les affaires publiques du pays. Il est aussi le signe d’une petite évolution de la l’appropriation des droits et libertés d’expression, garanties par les conventions internationales relatives au droit de l’homme. Mais, elle est aussi l’expression d’un pays politiquement failli et dirigé par des flibustiers, associés à des mercenaires économiques et politiques incapables de fournir une alternative viable aux problèmes de la misère, du chômage, de l’insécurité, des immondices jonchées dans les différentes artères des grandes villes, etc. C’est à ce niveau que se pose les vrais problèmes de la crise actuelles.

Il faut faire remarquer qu’en dehors des “petro-challengers” et des masses haïtiennes victimes de l’escroquerie de la gouvernance politique et administrative du pays, certains estiment que dans ce conflit s’opposent aussi des corrompus et corrupteurs associés au politique “d’oppo” contre des corrompus. En conséquence, l’enjeu de la crise serait plutôt politique et principalement économique que de fonds de protestations collectives pour un véritable déstructuration d’un système d’exploitation économique anti-peuple pour emprunter l’esprit de la terminologie de Marx, un système d’exploitation contre la masse, épaulé par une classe moyenne réactionnaire et ambitieuse. Le phénomène route block et pays lock peut être lu comme une tentative de démonstration la quête de l’opinion et de l’assentiment populaire sur le fond revendicatif et politique de l’heure. Il s’agit aussi d’une démonstration des rapports de force sous une forme perverse de capacité de mobilisation populaire. Il sous-entend aussi un malaise dans la configuration du système et des systèmes parallèles construits et transformés de 1804 à nos jours, symptomatique d’un problème de coordination et de la gouvernance politique et administrative du pays.

Ce qu’il faut noter, en dehors de l’imbrication des acteurs occultes, ci-dessus mentionnés, les protestations collectives en cours sont une contestation inédite, c’est-à-dire, elle est singulière dans l’histoire du pays pour plusieurs raisons. D’abord, elle est initiée et entretenue par des jeunes, qui restent au contrôle, en dépit des efforts de récupération politique et politiciennes. Ensuite, c’est la première fois, dans ce pays, qu’une affaire de corruption, d’escroquerie au niveau de la gestion des fonds publics fait autant de remous ou point de donner lieu à un mouvement social au niveau interne attaquant des systèmes parallèles aussi anciens que la société haïtienne elle-même. Ce mouvement exige un « dégagisme » des allés du pouvoir politique pour donner lieu à un véritable changement du mode de la gouvernance politique et administrative du pays. Autrefois, l’haïtien revendiquait sa liberté d’expression, contre « koko makak » aujourd’hui c’est une contestation antisystème, qui couvre non seulement les droits fondamentaux inaliénables y inclus les questions de liberté, des droits de l’homme, mais aussi de partage et de la circulation de la richesse dans le pays. Un autre aspect qui rend le contexte particulier est le fait que le politique ne peut pas à lui seule trouver la solution à la crise. Car, contrairement aux contextes politiques précédents, où les politiciens et parti au pouvoir avaient l’aise de trouver des compromis politiques entre eux pour le partage du butin, aujourd’hui, c’est le social, en particulier les jeunes, pour la plupart sans affinités, ni des affiliations politiques qui détiennent les véritables maillets de la solution. Donc, « Tout nèg k ap pare pou al banbile aprè nèg ki o pouvwa yo ta pati, y ap pral bwè gaz ». Enfin, c’est inédit aussi, du fait que les protestations s’inscrivent dans un mouvement mondial, universel de lutte contre la corruption et d’exigence de bonne gestion des avoirs publiques et de la destinée des gouvernés. 

Dans cette perspective, la crise actuelle est une opportunité pour adresser les vrais problèmes de l’instauration de la démocratie dans le pays. C’est bien malheureux qu’on n’ait pas profiter pour initialiser une éducation démocratique à travers le medium, en guise de préparation. Mais, elle ne peut être une opportunité pour les masses des dépossédés héritières de 1804 s’il n’y a pas une véritable conscience de classe des intérêts qui en sont en jeux. Certes, des résultats de la protestation collective sont en passe de réalisation, comme les contradictions qui apparaissent dans le système « peze souse yo enstale depi 1804 la » ; Des acteurs de la crise, de tout bord qui débordent de discours de révolution dans le système. Cependant, le résultat des contradictions qui apparaissent et des promesses de chambardement du système ne sont que conjoncturelles voire, qu’occasionnel. Les systèmes parallèles resteront entiers, tant que leurs fondements ne sont pas attaqués et déracinés à jamais. D’ailleurs, j’ai parlé d’habitus qui se sont installés et qui ont amplifié la donne au fil du temps. Ce ne serait pas un simple changement d’un régime que ces habitus disparaitront. Ces mêmes acteurs de la société économique qui ont financé des hommes politiques, qui ont joué sur plusieurs tableaux, ne l’ont pas fait en raison de leur conviction du bien-fondé des programmes de ces hommes pour les intérêts de la masse. Certainement, ils l’ont fait en raison de leur intérêt. Car, ils n’acceptent pas d’être en dehors de l’arène du pouvoir. « Fò yo anndan pouvwa menm pou yo ka kontinye tete manmèl bèf la. Menm si manmèl la pa gen lèt ankò, nan tete yo kwè y ap jwenn san. Dayè se vanpi yo ye. Y ap santi l pi dous menm ».

La majorité nationale de ce pays doit s’assurer du contrôle jusqu’à la fin de son mouvement protestataire ayant fixé comme résultats : la tenue d’un vrai procès petro-caribe et le changement en profonde de la gouvernance politique et administrative du pays. Comme, la personne de Jovenel Moise n’insuffle pas la confiance pour la tenue d’un tel procès et qu’il n’a pas donné signe de réalisation de ses promesse politiques, il est certain que les vrais protestataires continueront à demander sa démission. Ni de première voie, ni de seconde et pire encore de troisième voie ne garantira pas l’intérêt de la majorité nationale au départ de Mr Moise sans une désagrégation des intérêts des masses de ceux des flibustiers, ces pilleurs de pays qui ne font que « vin pran pou yo ale » comme l’a si bien dit dans Savalou de Zafèm.

A mon avis, la résolution de la crise, passe par l’intégration de tous dans le projet de l’Haïti contemporaine, incluant les héritiers des pères fondateurs de la patrie haïtienne et des nouveaux haïtiens, arabes, juifs, occidentaux, qu’Haïti a chaleureusement accueilli. Ce processus inclusif est peu probable sans une véritable et souveraine conférence nationale haïtienne. En plus, de cela, il faudra une démarche de démystification de la crise haïtienne et adopter la thérapeutique appropriée pour créer ce vivre-ensemble nouveau. Si non, il n’y aura pas de rupture et les systèmes parallèles qu’on indexe de tout part. Le cycle de crise, ses manifestations actuelles, indicatrices du malaise haïtien comme la crise politique de 1991, 2004, les émeutes de la faim de 2008, les mouvances du 6, 7 juillet 2018, les protestations collectives de septembre 2019 à date, perdureront dans le pays.

Quoi changer et comment ?

Nous venons de voir ensemble le tréfonds de la crise haïtienne actuelle. Récapitulons ! La crise est le fait d’une totalité et elle est profonde ; Elle est le résultat des systèmes parallèles initialisés à l’aube de 1804, mais qui se sont intensifiés par des phénomènes de migration de l’extérieur vers l’intérieur. Elle aussi l’expression d’un manque d’imagination politique au niveau interne, en dépit du symbolisme permanent de la révolution haïtienne de 1804. On a aussi apprécié la crise comme une opportunité pour un véritable changement dans le mode de gouvernance politique et administrative du pays. On s’est convenu que ce changement ne s’obtiendra pas sans un esprit de sacrifice, d’une démarche inclusive et participative de tous les acteurs, anciens ou nouveaux, de la communauté haïtienne.

Certes, des passagers clandestins, du politique, traditionnalistes et avares, ainsi que de l’économique « aloufa », tous deux, sans aucun attachement au pays et à son rêve indépendantiste, essaient de se poster en « bèl jwè » afin de récupérer le mouvement revendicatif, juste, de la masse des jeunes de ce pays pour continuer à « souse manmèl bèf la ». Il est, à mon avis, peu probable, qu’il en arrive à leur fin. J’avance plusieurs raisons : (1) La détermination observée ; (2) La discréditation que se sont couverts ceux qui tentent d’émerger comme leader du mouvement et se positionner aux joutes électorales dans le futur ; (3) Le caractère. Démocratique et universel des contestations en cours. Je voudrais faire remarquer que les opportunistes ne s’en rendent pas compte que les contestations actuelles ne pourront pas prendre une forme politique pour gagner les prochaines joutes électorales. Les initiateurs du mouvement avent faire la distinction entre les finalités stratégiques et les approches tactiques. C’est sûr que ce mouvement ne s’arrêtera pas au départ de Mr Moise et qu’il doit ouvrir la voie à l’établissement d’une vraie démocratie dans le pays. Je ne suis pas en train de dire que la démocratie est la voie pour résoudre tous les problèmes sociaux. Car, on a déjà vu ses faiblesses en ce sens. Mais j’estiment, qu’elle offre plus de possibilité de recherche de la liberté et de défense des droits de la personne humaine.

J’estime que les tabous sont tombés et les clichés et les intérêts de la classe politique et économique pour le maintien du statuquo sont démasqués. Ils ont eux aussi la peur d’être jugés, d’aller en prison ou de rendre l’argent publique qu’ils ont pillés et dilapider, aussi bien du petro-caribe que par le contrôle de toutes portes d’entrée des recettes de l’État : Direction générale des Impôts, les ports, les douanes, les frontières, l’ONA et j’en passe. Je prédis que le mouvement contestataire sera viscéral. En ce sens, ces passagers clandestin, faux démocrates, autant mauvais que ceux qu’ils prétendre s’associer pour combattre (zwazo menm plim, menm plimay ), seront rattrapés et ramenés au même piquet afin de rendre des comptes. Je prédis que beaucoup, autant « gagoteurs » des fonds petro-caribé, ONA, contrats d’énergie et autres que ceux qui sont claironnés comme les grands coupables, lesquels qui essaient de se diluer dans les eaux du mouvement protestataire petro-caribé, sont prêts à tout pour se faire épargner de tout procès. Je prédis, comme la majorité des haïtiens un profond tabula-rasa attaquant aussi les autres problèmes de la gouvernance politique du pays qui ne sont pas sur la table des frictions politiques. Il est évident le procès des systèmes parallèles sera d’un symbolisme fort d’un nouveau départ dans le mode de gouvernance politique et administratif du pays.

Il est bon de faire remarquer qu’il y a des subtilités et des volatilités à corriger dans le mouvement contestataire global : (1) Le caractère du mouvement doit demeurer pacifique et civique; (2) Il doit caractère éthique et étique, dénonçant tout ce qui ne cadre pas avec les droits et devoir du citoyen ; (3) Les cas de rançonnage au travers des barricades érigées doivent être dénoncés et réprimés ; (4) Certaines violations de la convention de Vienne (1949) relatives aux crimes de guerre doivent être évitées ; (5) et éviter l’entrainement de certains obstacles à la jouissance pleine et entière des droits et libertés individuels conformément la déclaration universelle des Droits de l’homme, conventions internationales et autres documents juridiques internationaux.

Comme vous avez remarqué, moi je parle de systèmes parallèles comme le problème et de système. Car, à mon avis le discours système est un discours bafoué, d’autant plus que la demande « qu’il faut changer le système » est un slogan flou. Car, ce sont plutôt des systèmes parallèles, illégaux, frauduleux et mafieux institués par les acteurs économiques, mais aussi la manière d’être et de faire de nos dirigent politiques qui empêchent le pays de fonctionner et de délivrer des résultats, apportant un minimum de bien-être des communautés haïtiennes. En affirmant qu’il faut changer le système c’aurait accepté l’échec total de la révolution haïtienne de 1804 de dire que le pays est vide, en termes de dispositions légales établissant les directives d’opérationnalisation de la gouvernance politique et administrative du pays garantissant un minimum de bien-être des sujets de cette gouvernance. Or, il n’en n’est pas question. Haïti est parmi les pays ayant les meilleures dispositions juridiques en matière d’organisation politique et administrative d’un pays. Le problème est plutôt au niveau de l’application de ces dispositifs existant et des manières de le contourner instituées par des gens qui n’ont aucune attache au rêve de la révolution haïtienne de 1804, d’une part et des mercenaires politiques qui ne cherchent qu’à assouvir leur poche et satisfaire leur bas instinct, d’autre part. A côté de cela, il y a distorsion mentale et la nouvelle perception haïtienne qui se sont, progressivement, qui elles aussi ont facilité l’assise de ce système parallèle illégal, antinational et frauduleux de l’économique, ainsi que le dirigisme mafieux du politique.

A mon avis, il faut poser le problème convenablement, déterminer le changement voulu, qui sera la fin des systèmes parallèles, des États dans l’ETAT et du dirigisme politique « poupe twèl » et pire encore importée. Puis, il faudra théoriser ce changement, définir sa méthode, déterminer ses contenus et ingrédients, mais aussi s’accorder et communiquer sur un calendrier pour y parvenir et son système d’évaluation périodique indépendante. Sinon, les irritations reprendront le debout, ainsi que la réalité « pa ka tann ankò » et compliqueront l’arrivée du changement souhaité en ramenant le cercle vicieux d’instabilité dans le pays. En conséquence, le rêve de contrer les systèmes parallèles illégaux, antinationaux et frauduleux de l’économique, ainsi que le dirigisme mafieux du politique en Haïti ne resteraient que des vœux pieux.

Au terminus

Les systèmes parallèles sont les problèmes fondamentaux à résoudre pour mettre fin à l’insoutenable descente aux enfers de la condition haïtienne et de sa démocratie. La bataille doit aboutir à l’inclusion de tous les fils et filles du pays dans la vie sociale, spirituelle et économique du pays. Que cette bataille puisse, enfin changer la condition ségrégationniste de la société haïtienne comme : Une école à deux vitesses, l’une pour les pauvres et l’autre pour les fortunés ; Une économie d’exclusion : mettant de manière permanente en conflit les pauvres et les riches ; Une justice discriminatrice : Une justice punitive pour les pauvres et une autre permissive pour les riches ; … etc. Que le système soit le système de tous et pour tous ! Pour cela, il ne faut plus jamais accepter que des individus ou des groupes d’individus deviennent les maitres, gardiens ou califes du système par le financement des élections d’individus qui, conséquemment, leur confèrent des privilèges au détriment de la majorité nationale. 

Eu égard à mes questions de départ, j’affirme qu’il est possible de profiter de cette présente crise pour poser les jalons d’une rupture avec des habitus économiques de prédation, des modes de mystification de l’autre et des manières de composition cyniques de la classe politique, du comportement réactionnaire de la classe intellectuelle et d’une frange de la masse haïtienne.  J’hypothèse que le cycle permanent de violence en Haïti, semble être symptomatique des séquelles esclavagistes, des problèmes émotionnels générés, jamais identifiés ou guéris qui seraient les prédispositions au déclic de heurts et déchirements internes. Enfin, je soutien que la crise actuelle est une opportunité pour assurer une refondation des bases de la gouvernance politique et administrative du pays.

Jean Laforest Visene de Lyvia Tulcé | visenejl@gmail.com
LTVJL
L’homme de Vilou,
Assis sous la grande roche de BasenKap
A mi-parcours du long de la rive droite de la rivière de Cavaillon

mardi 21 avril 2020

Ann kwape kouwòn lanmò kowona viris la



Ann kwape kouwòn lanmò kowona viris la

Mezanmi nou wè kowona viris la sou nou toubon vre! Nou wè gen rezon pou nou pran prekosyon e fè prevansyon pou nou pa trape viris la ! Se pou tèt sa nou tout nou dwe pran reponsabilite nou pou ede peyi a, otorite sanitè yo, oksilyè, enfimyè ak doktè nou yo pou yo fè fas kare ak epidemi an.

1.      Ann fè prevansyon
Men kèk konsèy, m tire nan tout sa k ap di sou maladi m panse ki ka ede fè prevansyon pou n pa trape viris la :

                                i.            Konsome pwodwi sa yo
San nou pap bliye pwovèb sa ki di : exsè an tou nwi, men sa nou ka konome kòm prevansyon :

i.            Bwè yon tas pipi w chak maten. Nan plizyè peyi yo itilize sa kóm medikaman pou ogmante rezistan kò moun e trete anpil maladi. Ann Ayiti, depi lontan yo te konn itilize l lè moun gen lafyèv, gripe, oubyen pran kout lè.

ii.            Pran yon bout chabon bwa, pile l oubyen graje l epi pran yon kiyè, mete l nan yon ti dlo epi bwè li. Ou ka fè de ou twa fwa pa semèn. Chabon an se se yon gwo medikaman kont pwazon.

iii.            Chak maten bwè te langrichat, choublak, amwaz (absent amè), bwa chèn, noni, ten, chadèk, zoranj. Se sèl pou mete nan te sa yo, se pa sik. Paske se sèl la k ap fasilite aksyon te a nan kò w. Kòm pa gen enfòmasyon sou jan nou ka doze yo epitou nou pa konn tout pwopriyete plant sa yo pa melanje yo tout ansan. Si w vle melanje yo cheche konnen kòman yo konn melanje yo nan medsin tradisyonèl bò lakay.

iv.            Chak manten bwè dlo sitwon ak lay vyolèt. Mete dlo a cho epi mete sitwon an ladan l e koupe lay la tibout tibout, bwè l.

v.            Bwè lalwa. Kale l epi pran pati ki anndan l lan.

vi.            Bwè lèt cho. Men pa pran twòp, sitou si w deja gen bon ti laj. Lèt cho sanble se yon bon klinè pou poumon.

vii.            Manje anpil zonyon, powo, siv, kawòt ak lòt ankò.

viii.            Bwè yon kiyè siwo myèl chak maten.

ix.            Bwè ti te kanèl nou, bazilik, kowosòl ak lòt nou konnen anplis ajoute miskad. Te sa yo brake ak sik. Kòm nou konn twop sik pa bon pou lasante, kit se siwo myè ou sa k soti nan kann nan.

2.      Respekte jès baryè yo

Men jès baryè pou nou respekte yo :

i.            Lave men nou toutan. Pote mask nou toutan nou kote lòt moun oubyen le nou nan lari. Pa mete men nou nan bouch nou oubyen foure l nan twou nen noua k sye nou.

ii.            Mezanmi ann fè efò pou nou pa kite kouwòn lanmò kowona rive lakay nou. Sispan pran pòs nou nou eklere, nou siperyè pase lòt moun, nou se nèg lavi l, lòt la se peyizan, oubyen m rich ou pòv, fi wouj ti nwè ann nou tout solidè kont kowona viris la.

iii.            Ann respekte konsiy  yo ban nou yo pou n pwoteje tèt nou. Pa brave danje, pa di nou fò, ti viris sa pa ka fè nou anyen. Oubyen bondye bon oubyen tou mikwòb pa tiye ayisyen.

iv.            Toujou lave men ou ak dlo ak savon lè l sal. Pa foure men nou nan dlo n ap lave l la. Swa se nan yon tiyo l ap soti oswa yon lòt moun vide l sou men w pou nou.  Itilize alkòl gèl oubyen likid pou nou netwaye men nou sin pa ko jwen dlo ak savon pou nou lave men nou. Pa bliye sa, alkòl la pa ka ranplase dlo ak savon an pou nou netwaye men nou. Ni tou li pa tiye viris la dapre save yo epi apre apre 2 ou twa pase se lave pou nou lave men nou.

v.            Lè w ap estènen kouvri bouch ou ak nen w ak yon mouchwa.Li pis konseye pou itilize mouchwa papy.  Apre ou fin itilize l jete tousuit. Si w pa gen mouchwa pou touse oubyen estènen ladan l, pliye kout bra w sou ou, l ap vin tankou yon V pou fè sa nan mitan V a.

vi.            Evite kole kò nou oubyen sere sere sou yon moun ki soti nan yon zòn ki gen epidemi kowonaviris la, oubyen ki bay siy kòmkwa viris la ta déjà atake l. Kòm egzam siy maladi a mou nan ka ap touse de tanantan, li ka gen lafyèv, grip, kò fè mal, ak souf wo.

vii.            Pou moman sa a evite jwe ak bèt lakay nou sans nou pa proteje nou. Se vre jiskaprezan espesyalis yo di yo pa jwenn prev gwo chenn transmisyon ant bèt nan kay yo tankou chen, chat a moun. Ou pa jan m konnen, viris la ka modifye epi li miltipliye mòd transmisyon l. Li ta bon tou pou nou pa manje vyann bèt ki mouri poukont yo oubyen nou wè ki malad.

3.      Imanite nou ak relasyon sosyal nou
Mezanmi viris la se pa pyebwa li atake se moun parèy nou li atake. Moun sa yo takou nou yo gen santiman, yo gen dwa e yo merite ankadreman n pou yo pase move moman sa. Tampri soupe:

i.            Ann pa stigmatize yon moun nou ta sispèk ki malad oubyen atake l pou n touye l komkwa se konsa n ap evite nou pa pran viris la. Okontrè se lè sa ou mete tèt ou e kominote a risk pou viris la gaye pi plis. Ann oryante pito moun nou sispèk la bo kote doktè ak lopital. Ede l pou sove lavi l pito anba kouwòn lanmò ki pandye sou tèt li a.

ii.            Ann pote solidarite a malad yo pandan n ap pran tout prekosyon pou l pa trasmèt nou viris la.

4.      Si nou ou sispèk ou malad oubyen ou ta rive malad tout bon

Si malgré prevansyon ak prekosyon ou ou ta sispèk ou malad oubyen ou rive malad toutbon :
i.            Gade kalm ou, pa fè tèt cho.

ii.            Kontakte prese prese sèvis lasante ki pi prè w la sitou si w gen fyèv, si w ap touse oubye si w gen difikilte pou ou respire. Men nimewo ou ka rele yo : 4343, 3333, 37021733, 37021735.

Ann fè efo pou n soti nan move pas sa a. Si siklòn kowona touye kanmen, la a se pa p fòt pa nou.


Jean Laforest Visene de Lyvia Tulce
JLV@LT

mardi 10 mars 2020

Malgré Haïti, elle est aux origines et de l’entendement des programmes RVC et PSC - Première partie


Malgré Haïti, elle est aux origines et de l’entendement des programmes RVC et PSC - Première partie





Par Jean Laforest Visene de Lyvia Tulce



La crise socio-politique qui secoue Haïti a mis en relief combien les efforts en matière de Désarmement, Démobilisation et Réinsertion et la Reduction de la Violence Communautaire (RVC), ainsi que ses assimilés comme Programme de Sécurité Communautaire (PSC) étaient, en tant que tels, insuffisants. Il est évident que des armes illégales et les activistes de la violence armée en Haïti sont innombrables. On les trouve partout, dans les villes comme dans les bidonvilles, dans les milieux ruraux comme dans les milieux urbains, dans les zones réputées chaudes comme dans celles jadis considérées comme plus ou moins sûre. Comment doit-on comprendre cette inquiétante démonstration de l’existence des armes et le niveau de volatilité de la sécurité dans le pays, alors qu’Haïti, malgré elle, est aux origines et de l’entendement des programme RVC, PSC et assimilés ?





I.                    CADRE D’ORIENTATION



a.      Perspective et organisation du texte

Cette publication contient une série de quatre articles, Dans cette série, nous revisitons l’approche expérimentale, des programmes mis en œuvre sous le chapeau de la stabilisation et la recherche de la sécurité communautaire, en insistant sur le fondement historique de la violence en Haïti. La littérature locale et internationale sont bondées de référence liant la situation sécuritaire d’Haïti à un problème d’accaparement des ressources, donc de non-distribution de la richesse du pays. Au cours de cet exercice nous instrumentaliserons les concepts : Violence communautaire, Groupes armés, Sécurité communautaire, Réforme du Secteur de Sécurité (RSS). Cette série est développée comme suite, y inclus la présente :



·         Première partie : « Malgré tout, Haïti aux origines et de l’entendement des programmes RVC et PSC » ;

·          Deuxième partie : « RRSVC comme Outil de stabilisation et de sécurisation communautaire » ;

·         Troisième partie : « Postulat d’ordonnancement philosophique et d’opérationnalisation du RRSVC » ;

·          Quatrième partie : « Esquisse méthodologique pour une réorientation du RRSVC ».



b.      Raison de ce texte

Cette publication, sous la thématique « RRSVC en Haïti et pays congénères » aborde les fondements des actions en matière de DDR de seconde génération et de PSC que nous mettons dans un paquet global de Programme de Réduction des Risques Sécuritaires et de la Violence Communautaire (RRSVC). Les différentes parties du texte constituent notre contribution afin d’instituer la mémoire qu’Haïti est le berceau du RVC (La principale forme de DDR de seconde génération) et aussi du PSC.



Toutefois, le texte vise principalement à apporter une contribution pour initialiser un débat public sur les problèmes de fonds et les limites des programmes que nous englobons dans notre concept : « Reduction des Risques de Sécurité et de Violence Communautaire (RRSVC) ». Malgré, de toute évidence, ces types d’actions, initiées, sous le label RRSVC, sont des innovations issues de l’imagination coopératrice afin de contribuer à l’établissement de la paix dans des pays en crise. Une telle réflexion devrait permettre qu’on pose notre regard sur la panoplie d’outils afin que collectivement nous isolons les bonnes et les mauvaises pratiques.





II.                  AU-DELA DE LA CONCEPTION HAÏTIENNE DU RRSVC



a.      Des outils connectés à une parapluie d’autres

Dans leur conception et leur forme d’action, le PRC, la RVC et assimilés, sans oublier leur flexibilité, à part d’être un outil de DDR (Désarmement, Démobilisation et Réinsertion) sont des actions sous-jacentes à la coordination globale supportant d’une manière large la mise en œuvre de la stratégie de sécurisation et de stabilisation. Il y inclut la Réforme du Secteur de sécurité (SSR), la Réforme du Secteur de la Justice (RSJ), et même un appui à la Protection des civiles et l’intermédiation dans les conflits intercommunautaires.



Comme l’appellation des sous-composantes du RRSVC l’indique, chacune d’elles à influer positivement sur la sécurité humaine et d’amorcer les conditions d’une reprise socio-économique de leur zone cible. Ces types d’actions dans des programmes internationaux de stabilisation et de sécurisation, tels qu’en Haïti et dans d’autres pays congénères, sont encore à une phase de consolidation expérimentale. Elles constituent des approches très populaires et considérées comme des moyens additionnels innovants pour adresser des problèmes de sécurisation et de stabilisation, surtout dans des pays qualifiés de menace pour la sécurité internationale pour reprendre la terminologie habituelle des résolutions du Conseil de Sécurité des Nations Unies (CSNU). Dans divers milieux des pays développés elles sont aussi mises en avant comme action de prévention des risques de la délinquance juvénile dissimulée à travers des plans sociaux globaux.



b.      Au regard de la perspective DDR en Haïti

De son initiation en République d’Haïti, en 2006, à son implémentation en République démocratique du Congo, en 2016, une décennie d’expérimentation de l’approche Réduction de la Violence Communautaire (RVC/RVC) s’est écoulée. Durant, (i) des schémas de RVC ont été élaborés ; (ii) des forces et des faiblesses dans leur expérimentation sont mis en relief ; (iii) des efforts de théorisation essayé d’adresser les écarts observés ont été élaborées. Analysant le statut de RVC en termes d’approche et de ses applications particulières, la nécessité d’une revisite de l’approche et d’incitation à une discussion constructive sur son développement et son expansion paraît comme un besoin patent.  Certes, l’approche a fait ses preuves, mais les avancées en termes de cadrage méthodique et de pragmatisme par rapport aux buts resteraient à améliorer. 



Comment l’approche RVC peut être efficace au désengagement et/ou dislocation des groupes armés et/ou criminelles, c’est-à-dire être un artisan du Désarmement et de la Démobilisation (DD) en passant par la création et l’animation d’un espace de dialogue entre les acteurs en conflit, la création d’un climat de confiance et la facilitation aux actions subséquente ? Comment peut-elle, par la suite appuyer le processus de Réinsertion / Réintégration (RR) des combattants démobilisés, ce qui voudrait dire être le tremplin de l’initiation du RR, d’appui à la coordination du transfert du suivi du processus RR au niveau communautaire ? Comment elle peut contribuer à aux actions visant le contrôle et la circulation des armes (petits et grands calibre) dans les communautés ? Comment elle renforcer la capacité des communautés à prévenir et agir sur des facteurs et des vecteurs de la violence ? Telles sont les questions en filigrane de notre réflexion qui s’inspire, comme nous le disions, des ambitions au premier balbutiement de ce type de DDR.



Nous soutenons, ici, que RVC et PRC sont, en principe, des outils institutionnels de DDR dans leur vision classique mais, au service d’une démarche de Sécurisation, de Stabilisation et de Développement devait se situer à une sphère plus ambitieuse et devrait faire preuve de plus d’imagination et de coopération à un niveau plus large. Au relief des velléités de RVC à travers les résolutions du Conseil de Sécurité des Nations Unies (CSNU), la démarche de RVC ne s’est pas suffisamment structurée autant du programme DDR traditionnel. De ce fait, le RVC devait se poster comme un héritier   puisant dans la boîte à outils conçu pour la gestion du programme DDR traditionnel ou s’assurer d’une version adaptée de ces outils pour une meilleure efficacité de ses interventions. Car, le système de suivi et d’évaluation mis en place pour le DDR classique (DDR de première génération) donne une certaine garantie de cadrage méthodologique du programme, ainsi que la gestion des risques dans sa mise en œuvre.



Eu égard aux excursions observées dans les pratiques de RVC, une identification des formes de violence devant l’intéressé, un regard sur son champ d’intervention, son ordre philosophique et son opérationnalisation, et les facteurs et vecteurs de la violence à être priorisés et considérant les bonnes pratiques et celles contre-productives, nous faisons, en fin de texte, des propositions pour un recadrage de RVC aux regards des velléités et perspectives initiales de l’approche.





III.                DES ATTITUDES FLIBUSTIÈRES A L’AVENEMENT D’UNE VIOLENCE EXACERBEE DANS L’HAÏTI CONTEMPORAINE



Sociologiquement, la société haïtienne, depuis sa fondation est conçue pour engendre des foyers de tension sociale et d’insécurité humaine. En effet l’accès restrictive de la majorité populaire aux ressources a conduit à des actions intempestives de réponse désespérée dictée par l’instinct de survie qui anime tout individu ou groupe ayant une conscience collective de leur existence et de leur solidarité. Dès son début, la république était organisée en des groupuscules politiques et commerçantes fonctionnant suivant une philosophie de prédation et machiavélique de protection d’intérêts. Une vision que nous qualifions d’introspectif et d’inintelligence et de voyeurisme intellectuel.



A ce sujet, les propos du père de la patrie haïtienne et premier Président de cette république, Jean-Jacques Dessalines (1804-1806) à l’endroit de ses généraux, mulâtres pour la plupart, était sans équivoque. Il disait : « Et les pauvres noirs dont leurs pères sont en Afrique, n’auront-ils donc rien ». Ces généraux se sont accaparés de toutes les terres cultivables, ne laissant rien à la majorité des nouveaux libres noirs. S’amorce ainsi un cercle vicieux de distanciation sociale entre les fils et les filles de la première république noire indépendante du monde, aboutissant à la création de deux groupes antinomiques ceux qui sont fortunés et qui en ont trop et ceux dépouillés de leur droit légitime et qui n’en ont rien. En fait, en s’accaparant de toutes les terres arables l’intention était de reprendre le même système d’exploitation en remettant sous les jougs d’une nouvelle forme d’asservissement, dans le moindre des cas à travers d’un système d’exploitation rentière. Cette manière d’accaparement des richesses du pays naissant s’est perdurer jusqu’aujourd’hui.



 Cette attitude flibustière [1] de la classe possédante [2] politique et de l’élite intellectuelle, ainsi que celle commerçante des émigrés arabo-occidentale d’Haïti, a créé définitivement deux extrémités économiques dans un seul pays : Les enrichis et les appauvris. En effet, la classe politique, la classe possédante, l’élite intellectuelle ainsi que la nouvelle classe commerçante d’Haïti se comportent comme ces pirates d’antan, détournant leur proie pour se le placer à l’extérieur tout en se casant dans leur repaire, illusoirement inaccessible. Le système d’exploitation rentière institué a complétement dérangé le paysage économique local, créant de l’intérieur un cercle vicieux de dépendance dans tous les domaines.



Face à une telle matrice de la stature économique et politique, la majorité nationale se réfugie derrière des clichés symboliques de résistance, de subsistance, voire d’instinct de survie engendrant dans les têtes et dans les cœurs une distanciation introvertie à travers de représentations typiques. Ainsi, des clichés Ti Wouj - Nèg nwè, Bourgeois - Paysans / Bas-peuple le pays a transité vers des distinctions plus exclusives, à en citer comme, Nèg anwo - Nèg anba, OP - Baz, Militan - etidyan, Manm ti komite Legliz (TKL).  Ces clichés symboliques deviennent des réflexes d’une conscience collective des masses d’appartenance à des groupes sociaux unique de condition. Ainsi, émiettant davantage le tissu social haïtien déjà fragilisé par une « clanisation » arbitraire depuis l’indépendance celui de l’haïtien nègre pure de race d’Afrique et l’haïtien de couleur issue des rapports entre les colons blancs et des esclaves négresses. Cette intense clivage de la conscience collective des masses populaire haïtienne à faciliter des récupérations à des fins égo-économiques des membres de la minorité bourgeoise entrée elle-même scission et déchirement internes pour, soit la conservation de monopole de sous-clans, soit l’accès à des secteurs d’activités économiques déjà contrôlés par d’autres.



Ainsi, à côté de la violence légitime détenus par les institutions républicaines de l’État, des factions économiques et politiques flibustières détiennent le monopole de la violence illégitime. L’accaparement de ce pouvoir est dû au fait de l’émiettement de la classe populaire accroupi dans des bidonvilles dans des conditions d’existence exécrables à la recherche d’accomplissement d’un rêve libertaire et d’un mieux-être à proximités les grandes agglomérations urbaines du pays. La vulnérabilité de la classe populaire s’est donc instrumentalisée à des fins de gain des clans économiques et politiques.



Construite sur une telle base de jeu d’acteurs politiques et économiques, opportun d’une école d’exclusion et étrangères aux caractéristiques sociales internes, d’une église assujettie aux intérêts et aux valeurs de la même mode d’exploitation esclavagiste d’antan, des vraies forces spirituelles du pays fonctionnant dans l’ombre du réel social, d’alliances instable entre les groupes sociaux, de motivations complexes et conséquemment de forces et de régimes politiques sans véritable possibilité et parfois capacité de vision d’ensemble, parsemé d’une perception internationale étriquée de la réussite d’Haïti que le pays a entretenu un système de relations sociales propices à la catastrophe consommé en 2004. Au lieu de l’intégration et l’engagement de l’élément haïtien dans les affaires de son pays on a assisté plutôt à un éloignement de l’être haïtien des centres vitaux des dimensions économiques, sociales et culturelles du pays. Ainsi, la vulnérabilité et la fracture instituées ont conduites à une désintégration du rêve indépendantiste haïtien de 1804 d’établir une société juste, inclusive, de vraie liberté et de fraternité pour ses fils et ses filles et la société universelle.



Ce contexte sociologique haïtien de crise complexe, à magnétisme d’éloignement permanent des motivations et intérêts des forces sociales du pays, de récupération opportuniste de la fragmentation de la classe populaire, s’amenuisent les barrières pour un éclatement féroce de la société globale du pays que les formes de gouvernances autocratiques et dictatoriales ont, pendant longtemps, retenues au ralenti. Avec l’avènement de la démocratie les verrous de rétention de cet éclatement se sont complétement effondrées, laissant ainsi la place à une manifestation visible l’intense flamme dans la poudrière flibustière, longtemps confinés dans les parties invisibles de la stature sociale haïtienne. Deux mille quatre n’était pas un événement conjoncturel mais sociétaire et communautaire, méritant d’être adressé avec des réponses à essence adapté aux conditions de cet éclatement.





IV.               HAÏTI ET LES DEBUTS DES FORMES D’ACTIONS RRSVC



4.1.            Le contexte politique et sécuritaire de 2001 à 2004

A la suite des élections conduisant au retour de Jean-Bertrand Aristide au pouvoir en 2001 en République d’Haïti, des protestations collectives mettent en présence deux grands groupes dénominatifs. D’un côté se trouve le groupe connu sous le label « Rat Pa Kaka » appelé ainsi pour leur mot d’ordre « Rat pa kaka, sourit pa travèse lari ». Ce groupe est aussi qualifié dans la littérature événementielle de l’époque de « chimère ». Il est l’allié du président au pouvoir. De l’autre, se trouve le groupe sous le label de « Grenn Nan Bouda (GNB) pour la plupart de jeunes universitaires et de leur mentors, orchestré particulièrement par la haute classe commerçante d’Haïti et ostensiblement par la classe politique de l’opposition. Entre 2002 et 2004 l’affrontement entre des deux groupes rivaux a complétement détérioré le climat sécuritaire du pays. Au début du mois de février de l’année 2004, un nouvel élément, sous l’appellation de Front Révolutionnaire du Nord (FRN) plus connus comme l’Armée du Nord, dirigé par un ancien Militaire et commissaire de Police dissident au pouvoir d’alors, Guy Philippe rentre en selle et se place aux côtés de l’opposition pour chasser le Président en poste. Face à une organisation sécuritaire constituée seulement de la jeune force de Police Nationale d’Haïti, puisque les Forces Armées d’Haïti (FA d’H) ont été dissoutes par le Président Jean Bertrand Aristide à son retour d’exil en 1994, l’armée du Nord bien équipé, depuis son fief dans le département de l’Artibonite, défait la PNH sur son parcours et fait route à Port-au-Prince afin, affirme son leader, de chasser le Président du pouvoir.



Mobilisé particulièrement à Port-au-Prince, le groupe de Rat Pa Kaka se mobilise pour affronter l’armée du Nord dans la capitale. Avant l’arrivée de l’armée du nord à Port-au-Prince, volontairement ou forcé, le Président Jean Bertrand Aristide a laissé le pouvoir le 29 février 2004 et s’est ou s’est fait exiler en République Centrafricaine (RCA). La présence d’une force multinationale, composé en particulier de la France et des États-Unis, a empêché la rentrée de l’Armée du Nord à Port-au-Prince et ainsi éviter les affrontements entre cette dernière et les membres du groupes Rat Pa Kaka dans la capitale. Néanmoins le groupe de l’armée du Nord, composés d’anciens militaires, des membres l’ancien groupe paramilitaire connus sous le nom de FRAPPE et opposant au pouvoir lavalasse durant la période de coup-d ’État contre le sieur Aristide entre 1991 et 1994, et de membres de partis opposants au pouvoir lavalas, reste très actif dans la partie du Nord. De leur côté, le groupe Rat Pa Kaka cris au Kidnapping du Président Aristide et lance une opération dénommé « Opération Bagdad » créant une situation d’insécurité particulière d’insécurité particulière dans l’aire de Port-au-Prince et des zones acquises à la cause de lavalasse.



4.2.            De l’avènement de la force d’interposition des Nations Unies en Haïti

Le même jour du départ de Jean Bertrand Aristide du pouvoir, le Conseil de Sécurité des Nations Unies (CSNU) a adopté la résolution 1529 autorisant le déploiement d’une Force Multinationale Intérimaire (FMI). Le 30 avril 2004, à travers la résolution 1542, a été institué dans le pays une mission multidimensionnelle de stabilisation connu sous le sigle MINUSTAH (Mission des Nations Unies Pour la Stabilisation en Haïti) dont l’un des aspects de son mandat était de conduire un programme de Désarmement, Démobilisation et de Réinsertion (DDR). En terme du volume du travail à abattre, une évaluation conduite par le chercheur brésilien Robert Muggah (Genève, 2005) [3], indiquait un chiffre de plus de 170 000 armes légères illégales, surtout des pistolets (38,9 mm) et des revolvers (5,56 mm et 7,62 mm) des armes créoles), des fusils d’assaut (7,62 mm) en circulation dans le pays et de toute évidence menaceraient la sécurisation et la stabilisation du pays. Ce chiffre ne prendrait pas en compte les armes les armes semi- automatiques comme M16, M14, PMK, Uzi illégalement en circulation dans le pays, ni celles, certes légalement enregistrées, mais détenus par les anciens membres des forces de sécurité étatiques. Ces armes sont reparties entre des groupes très diversifiés allant des ex-Forces armées d’Haïti (FADH), des anciens paramilitaires (du FRAPH), des anciens membres de la garde présidentielle, des organisations populaires (OP) / milices d’auto-défenses / des « baz », des groupes criminels organisés dont une partie est appelé zenglendos en raison de son mode opératoire de nuit, des sociétés de sécurité privées, des membres de la classe politique, jusqu’aux particuliers. Comme l’a indiqué Muggah (OP. Cit) :



« Les élites civiles et des segments des communautés plus pauvres détiennent d’importantes quantités d’armes - même si c’est pour des raisons très différentes souvent. Des éminences grises locales - fréquemment liées à des groupes armés au sein de communautés plus pauvres - n’hésitent pas à recourir à la violence armée pour défendre leurs intérêts. Le monopole local de la violence est devenu un signe de vrai pouvoir ».



4.3.            Nécessité d’une approche adaptée au contexte spécifique d’Haïti



De concert la mission des Nations Unies, la partie national, représentée par le Conseil National de Désarmement (CND), a mis en place un programme de DDR de 2004 à 2006. A côté de ce programme un bureau pour la prise en charge des militaires démobilisé, devant faire le travail complémentaire du programme de DDR a été mis en place. Suite aux infructueuses pérégrination de récoltes des armées, supposément 300,000 armes en circulation, la question de l’adaptabilité de la stratégie de DDR a été soulevée dans les milieux organisationnels et critiques.



Il faut dire que le programme était conçu sur le modèle classique de DDR implémenté dans des contexte de conflit mettant en présence des groupes armées ayant la posture de véritable organisation armée, structurée et hiérarchisée et soumis à une forme de discipline militaire. En effet les groupes en présence en Haïti ne répondaient pas aux critères des groupes armées formelles. D’ailleurs, ils étaient l’émanation d’une conjoncture politique particulière, quoique résultant d’un conflit latent entre le courant lavalasse et les partis de l’opposition, mais qui n’était pas fait l’objet d’une organisation armée. Sur la base d’une compréhension de la structure et de la dynamique des groupes armés, en 2006, opté pour un type non classique adapté au contexte sécuritaire de la République d’Haïti et des formes la menace pour la sécurité et la stabilisation du pays. Ainsi, une nouvelle approche de Réduction des Risques Sécuritaires et de Violence Communautaire (Désarmement, Démobilisation et de Réinsertion (DDR) de seconde génération.



Cette approche est Réduction des Risques Sécuritaires et de Violence Communautaire connue sous l’appellation de Programme Réduction de la Violence Communautaire (RVC) [4] plus populaire sous sa traduction en anglaise « Community Violence Reduction (RVC) Programme ». Comme son origine le laisse supposé, un tel programme se focalise sur la prévention et la déconstruction de la violence armée [5]. Cette génération de DDR se proclamait être efficace afin d’adresser des problèmes de sécurité et de stabilité communautaire, en particulier ceux qui sont le fait de l’existence des facteurs et des vecteurs de la violence au sein de la communauté elle-même et plus spécifiquement en raison de la présence des groupes armés et/ou criminelles. Conçu dans un cadre multi-acteurs et interagissant et privilégiant une approche spécifique, elle est, de fond, un élément d’une stratégie globale de réduction des violences communautaires ayant comme vecteurs et facteurs de fond l’extrême pauvreté, précarité et d’autres aléas humains majeurs.



Le DDR dit RVC [6] répond à des caractéristiques et à des spécificités internes de la violence dans des unités géographiques où la stratégie formaliste de DDR se révélerait inefficace pour adresser les problèmes fondamentaux de sécurité et de stabilité dans un contexte d’effort de la communauté internationale pour appuyer un pays à résoudre des problèmes de conflits. Certaines critiques soutiennent, généralement, d’un résultat mitigé des programmes nationaux de DDR en matière de réelle assistance à la réinsertion et à la réintégration des ex-combattants, la récolte effective et ordonnée des armes illégales en circulation.  Certes, nous n’en discordons pas avec cet avis, mais un fait est certain, il faut cadrer les interventions aux contextes et aléas systémiques, incluant la conceptualisation desdits programmes, le mode d’appropriation au niveau local, les conditions d’agir des parties, c’est-à-dire : décideurs, intervenants, société civile, bénéficiaires et institutions de suivi. Ces considérations sont autant valables tant pour les programmes de DDR classique que ceux appelés Programme de Sécurité Communautaire (PSC) et les secondes génération dites Réduction de la Violence Communautaire (RVC/RVC). Notons que ce dernier programme s’ambitionnait de porter un appui afin de compenser le déficit de service observé et de se focaliser des facteurs déterministes de la violence armée.



Vu les visages nouveaux sous lesquels se présentent les conflits dans le monde l’innovation des stratégies visant la sécurité communautaire ou la réduction de la violence communautaire à travers des de Désarmement, Démobilisation et Réinsertion (DDR), conjugué de stratégie de réduction de l’extrême pauvreté et précarité humaine est une bonne chose. Voilà pourquoi nous estimons qu’il est important d’analyser les injonctions, les inconvénients et les risques de telles tendances. Ce qui, sans doute contribuera, à rendre plausible les forces, faiblesses, risques et opportunités de ce nouvelles tendance et aussi aider à avoir un bon niveau d’information et une vraie motivation, de dégager une bonne vision afin de rendre l’approche plus efficace et plus efficiente.



Nous voudrions indiquer que nous notre réflexion est particulièrement une perspective RVC/RVC puisqu’elle est au paravent des autres stratégies subséquentes, y inclus les Programme de Sécurité Communautaire. (PSC), quoique initié dans un cadre d’action conjointe [7].





V.                EN GUISE DE CONCLUSION



Nous voudrions indiquer que cette réflexion et celles qui s’ensuivront dans les trois autres articles, à paraître dans le même canal, n’ont pas la prétention d’être complet. Mais l’utilité principale recherchée est de soulever un vrai débat, réunissant, non seulement praticiens, mais aussi des gouvernants / décideurs, bénéficiaires, des acteurs de la sociétés civiles sur la posture que doit avoir un vrai programme RRSVC de type PSC et ou de RVC. Il s’agit donc de susciter un regard critique sur ses pratiques afin de raffiner la théorie d’intervention et d'encourager les décideurs, les praticiens et les bénéficiaires à construire ensemble la pédagogie d’identification des écarts dans leur programme, de déterminer eux-mêmes les réponses appropriées et de les implémenter.



Le cas de l’avènement des programme RRSVC est riche d’enseignement sur cette approche de réduction des risques de sécurité et de violence communautaire. Car, il a permis d’abord aux acteurs de reconnaître que les solutions classiques et mécaniques ne sont pas toujours potables sans adaptation aux contextes d’un autre environnement ayant ses caractéristiques sociologiques propres du conflit c’est-à-dire une approche localement adaptée à la dynamique poli- tique, sociale et économique de communautés. Il a mis en exergue la nécessité de disposer d’indications sur les motivations et les intérêts sous-jacents qui caractérisent la détention et la manipulation des armes dans le conflit, nombre, la répartition des armes illégales à travers les groupes et clans afin d’adapter la stratégie à les faire sortir de la circulation, le profil de leurs utilisateurs, afin de pouvoir leur fournir les services appropriés soit en termes de d’intégration / de réintégration ou de service de sécurité.



Enfin, nous voudrions signaler que dans cette partie nous n’avons pas jugé les résultats obtenus dans les programmes RRSVC implémentés dans le pays. En dépit de notre reconnaissance de la viabilité de l’approche en termes d’intention pour adresser la question de l’instrumentalisation de la pauvreté économique et spirituel (dans le sens éducatif et psychologique du terme) il est un fait que de telles initiatives n’ont pas apportées les résultats escomptés pour plusieurs raisons que nous révélerons dans les parties suivantes.



 Pourquoi la RRSVC est un bon outil de stabilisation et de sécurisation communautaire ? c’est ce que nous verrons dans la deuxième partie de notre réflexion en nous appuyant sur les dispositions fondatrices de la pratiques et la définition élargie du concept de violence



VI.             NOTE ET REFERENCES



(1)         La notions attitude flibustière est assimilée au comportement des pirates français du temps de la colonie de Saint-Domingue qui ne faisaient que d’attendre en haute mers les cargaisons partant de la colonie vers la métropole afin de les détourner vers leur repaire. Non seulement c’est un comportement d’antivaleurs, c’est surtout un rapport de gain illicite et de perte sèche.


 


(2)         Ce terme n’implique pas pour autant l’existence d’une classe bourgeoise en Haïti. Car, en dehors du fait de la détention de la richesse du pays, il n’existe au niveau de cette classe aucune autre caractéristique sociologique de la définition de la bourgeoisie. Cependant, sans en prendre la défense, il faut reconnaître que divers autres facteurs ont contribué à ce type de maquettage non bourgeois de la classe possédante que les politiques eux-mêmes en sont responsables. On peut indiquer par exemple, la réduction du comportement au rôle de simple marchant, grossiste de cette classe évitant toute investissement dans la production nationale, justifié à tort ou à raison par l’absence de garantie des investissements dans le pays. Donc, l’attitude de mercenariat de la classe est une conséquence des inconséquences de la classe politique et intellectuelle qui n’ont pas rationnellement au moment qu’il n’était pas nécessaire de mettre le holà à la pratique « Koupe tèt, boule kay. Car cette pratique après l’indépendance n’a que faire appauvrir le pays et créer la dépendance externe.


 


(3)         Robert Muggah, « Haïti : Les chemins de la transition – Étude de l’insécurité humaine et des perspectives de désarmement, démobilisation et de réintégration », Small Arms Survey Institute, Institut Universitaire des Hautes Études Internationales, Genève, 2005.


 


(4)         Jean Laforest Visene de Lyvia Tulce, “ To seeking philosophy and ideal schemes of the DDR second génération / community violence reduction programme ”, Vendredi 12 mai 2017;  https://visenejl.blogspot.com/2017/05/to-seeking-philosophy-and-ideal-schemes.html;




(5)         Moritz Schuberth le nomme carrément “ armed violence reduction and prevention (AVRP)”.  Il a indiqué que l’AVRP englobe à la fois la réduction de la violence et la prévention de la violence. Un tel programme met l’accent sur les causes socio-économiques de la violence, sur l'identification des facteurs de risque «qui contribuent à augmenter la probabilité qu'un individu commette un acte violent» et des facteurs de résilience «qui aident les individus dans des circonstances défavorables à surmonter l'adversité et à éviter la violence» Lorsque ces deux ensembles de facteurs ont identifiées, indique - t ’il, les interventions ciblées peuvent être axées sur la réduction des risques afin de prévenir la survenue de la violence armée. Voir son article intitulée “Disarmament, demobilization and reintegration in unconventional settings: the case of MINUSTAH’s community violence reduction” in INTERNATIONAL PEACEKEEPING, 2017, VOL. 24, NO. 3, 410–433, http://dx.doi.org/10.1080/13533312.2016.1277145; https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.1080/13533312.2016.1277145?needAccess=true




(6)         De manière générale le cadre d’une stratégie Réduction de la violence communautaire est extrêmement large. Car la violence communautaire inclus tous les sous-types des catégories des violences interpersonnelles et collectives englobant les formes de violence exercées de gré ou de force, structurelle ou endémique, fondées sur des inégalités des pratiques discriminatoires. Elle peut contenir la maltraitance des enfants, la violence exercée par le partenaire intime, la maltraitance des personnes âgées observées comme des pratiques collectives ou celle des membres de la famille, la violence des jeunes, les viols et les agressions sexuelles ainsi que la violence en milieu institutionnel. 


 


(7)         Faudrait-il préciser que le sigle RVC n’est pas à confondre dans le texte avec ce qu’on appelle dans plusieurs pays « Commission Vérité et Réconciliation » ou ce qu’on appelle « Cave à vin réfrigérée » qui ont aussi le même sigle : « RVC ».



Professeur Jean Laforest Visene de Lyvia Tulce

JLV@L.T