Choisir des bénéficiaires
des programmes D‘apaisement social visant la resolution ds problemes de Violence :
Proposition d’un modèle de selection
Par Jean Laforest Visene. -
L’outil d’identification
et le processus méthodologique que nous proposons ici visent à diminuer la
marge de risques que les projets d’un programme d’apaisement social visant la prévention
et/ou de Réduction de la Violence Communautaire et/ou urbaine n’atteignent pas
leur vraie cible. Car, comme l’avise le proverbe haïtien « Sót ki bay enbesil ki pa pran » (En
créole haïtien) [Traduction française : Les sots donnent, sauf les imbéciles qui ne prennent pas]. On
comprend aisément que l’absence des lignes de base et critères clairs et
objectifs de choix des bénéficiaires laissent la porte ouverte à une
interprétation du programme comme étant une illusion de perspective et en final
n’aura qu’un effet/impact nul et même pourra créer un cercle vicieux pour la
résolution du problème.
Les éléments de la
méthodologie d’identification et de sélection des bénéficiaires qui sont ici
proposés les critères, concernent les projets
adressés aux jeunes à risques et autres groupes vulnérables comme les femmes et
les enfants dont leur condition nécessitent une prise en charge pour résoudre
la violence urbaine. Dans plusieurs pays nous avons constaté que le paquet du
programme offert comprend des projets, a Haute Intensité de Main-d’œuvre
(HIMO), des projets d’infrastructures sociocommunautaires, des projets de formation
professionnelle, des activités génératrices de revenu et/incubation en entreprise
et des placements en emploi. Considérant que les deux premiers types de
projets mentionnés sont beaucoup plus à effet globalisant plus
qu’individualisant, cherchant à restaurer le tissu social et de développer une
culture de cohabitation pacifique entre les membres d’un même milieu, nous centrons notre analyse sur les trois derniers
type de projet.
I.
Nécessité de linkage théorique des critères
d’identification des bénéficiaires
Les critères
d’identification doivent être strictement liés à la démarche théorique du
programme ainsi qu’aux finalités de tel programme. Voilà pourquoi nous
privilégiions deux éléments fondamentaux :
·
L’association et la
manipulation dans le cycle de la violence ;
·
Le degré de vulnérabilité
qui prédispose au réservoir des groupes et des bandes.
Nous suggérons que la théorie
de changement de tels programmes établisse des liens directs entre le cycle spiral
des réseaux, la satisfaction des besoins de base et la dynamique ainsi que les
potentialités de migration de la violence communautaire. Voilà pourquoi les programmes
devraient s’accommoder à des éléments objectifs d’identification des bénéficiaires
dans ses zones cibles. Car, en principe de tel programme cherche à briser, non
seulement la vase mais aussi, les drains de conduis à la vase, le programme adressent
tant les éléments qui sont impliqués dans les groupes et les bandes en raison
de leur vulnérabilité économique et sociale mais aussi, des groupes spécifiques
(Femmes, enfants et jeunes à risques)
qui peuvent constituer un réservoir de recrutement et/ou de soutien aux bandes
et groupes armés.
Le processus d’identification des bénéficiaires que nous
proposons prend en compte l’histoire sociale de l’individu, c’est-à-dire des
relations sociales avec les groupes et/ou bandes armés, des questions monétaires (revenu et dépenses);
et de multiples autres aspects comme la sécurité alimentaire, les conditions de
vie, l’accès aux services de base, le statut socio-économique, la possession de
biens et de moyens de production.
Divisés en critères universelles, critères spécifiques et
critères liés à l’histoire sociale, la proposition est agencée de manière à éviter
la stigmatisation des bénéficiaires de tel programme.
II.
Critères d’identification des bénéficiaires
a)
Critères universelles d’éligibilité
Universellement, c’est-à-dire dans
toutes les zones cibles d’un programme apaisement
social visant la prévention et la réduction de la violence communautaire, les
bénéficiaires devaient répondre aux critères suivants :
·
Une
tranche d’âge en se référant à la statistique non seulement de la vulnérabilité
mais aussi de l’implication des membres de la communauté dans la dynamique de
violence ;
·
Le
niveau de scolarité, prenant en compte la question de l’inégalité des chances
des membres de la population devant l’enseignement. Ce serait préférable que les bénéficiaires soient sélectionné parmi
ceux qui n’ont pas bouclé ses études classique et/ou ceux qui soient déscolarisé
ou non-scolarisé ;
·
Pour
que cela ait un impact géographiquement mesurable, il faudra délimiter claire
l’aire de couverture du programme. Par exemple on doit délimiter claire l’aire
de résidence des bénéficiaires tout en tenant compte des durées de résidence.
Ce dernier permettra de limiter que ce type de programme au un effet de
mouvement de population vers des zones bénéficiaires de tels programme;
·
Il
faudra que la personne soit sans emploi et/ou activités génératrice de
revenu. La pérennité est à considère en évaluant ce critère. Car ce n’est pas parce que la personne est
occupée qui fait qu’il ne soit pas vulnérable.
·
Il
faudra aussi éviter de faire de ces programmes des clientes de certains
opportunistes qui ne cherchent que des occasions de manière malicieuse. Voilà
pourquoi il serait conseillé de mettre des garde-fous. Par exemple ceux qui ont
bénéficié d’activités génératrices de revenu de programme assimilés ou de programmes
de DDR (Désarmement, Démobilisation et Réinsertion), ou en attente d’un de tel
programme ou encore en attente d’être intégré dans les Forces de Défense et de
Sécurité d’en faire partie.
·
Eviter
que le programme ne soit pas en collusion avec des procédures judiciaires. Par
exemple il faudrait que les bénéficiaires ne fassent pas l’objet de poursuite
judiciaire au moment du programme ;
·
Il
est constaté dans certains programmes des cas d’abandons pour des motivations
d’indisponibilité. Il serait important de s’assurer que les bénéficiaires signe
un document d’engagement de disponibilité durant toute la durée du projet
concerné ;
·
Enfin
les bénéficiaires devraient s’engager à s’impliquer dans des activités de
promotion de la paix et de multiplication des effets de ces projets dans sa
communauté. Se postant ainsi comme des Peer-helper pour les futurs
bénéficiaires.
b)
Critères spécifiques de choix
Les critères spécifiques permettront de choisir les
bénéficiaires sur la base du degré de vulnérabilité des candidats aux projets
offerts par le programme. Ils se basent
sur la mesure spécifique des dimensions du conditionnement de la pauvreté de
l’individu[1]
qui le rend plus vulnérable et/ou manipulable dans le cycle de la violence
communautaire et /ou urbaine.
Ces critères se basent principalement sur des dimensions de
la pauvreté du candidat comme : Possession de biens et moyens de production ;
Composition du, ménage; Revenu ; Conditions d’habitation ; Statut
scolaire et professionnel ; Sécurité alimentaire ; Accès aux services
de base et au crédit ; Dépenses ; Apparence physique et habillement.
Le tableau, ci-dessous,
présente les critères de mesure et comment ils pourront être évalués et/ou exploités dans le
processus de sélection.
#
|
Dimension
|
Critère de mesure
|
%
|
1.
|
Possession de biens et moyens de production
|
·
Activités
économiques ;
·
Possession de
biens matériels;
·
Possession de biens
de luxe ;
·
Possession de radios ;
·
Possession de
la terre et/ou autre moyen de production;
·
Possession d’intrants
de production comme volaille (poules et..) vaches etc.;
·
Possession d’un
téléphone portable et/ou fixe ;
·
Equipement de
travail de la terre ;
·
Possession de
de transport et/ou mode de transport utilisé;
|
|
2.
|
Accommodation de ménage
|
·
Célibataire
dépendance parentale ;
·
Célibataire en
solitude ;
·
Famille
monoparentale
·
Veuf ou
veuve avec revenu ;
·
Veuf ou
veuve sans revenu
·
Orphelin sans
soutien;
·
En relation
conjugale, sans enfant ;
·
En relation
conjugale avec enfant ;
·
En relation
conjugale avec plusieurs enfants ;
|
|
3.
|
Revenu / satisfaction des besoins d base
|
·
Vivre avec son
revenu mensuel ;
·
Vivre avec
l’aide de parents ou connaissance
·
Vivre de la
mendicité.
|
|
4.
|
Conditions d’habitation
|
·
Maison en Brèches
/ paille ou en mur de béton ;
·
Superficie de
l’habitat ;
·
Statut :
Propriétaire, location ou donation ;
·
Ne pas avoir de
foyer ;
·
Nombre de
pièces comparé au nombre de personnes dans le ménage.
|
|
5.
|
Scolarisation / Statut Professionnel
|
·
Niveau de
scolarité atteint;
·
Profession;
·
Emploi.
|
|
6.
|
Sécurité alimentaire
|
·
Mode de
restauration : Restaurant, cuisson à domicile, ou fourni par des
tiers ;
·
Nombre de repas
par jour ;
·
Personne
présentant des signes de malnutrition ;
·
Famille avec
une femme enceinte ou plusieurs enfants sévèrement malnutris.
|
|
7.
|
Accès aux services de base et au crédit
|
·
Ménage ayant un
compte d’épargne ;
·
Parent bénéficiant
actuellement d’un prêt d’une institution ;
·
Avoir
personnellement bénéficié d’un crédit bancaire dans le passé.
|
|
8.
|
Dépenses
|
·
Capacité ou incapacité
d’acheter les aliments de base.
·
Capacité de
faire des dépenses de luxe.
|
|
9.
|
Apparence physique et habillement
|
·
Style
d’habillement et de coiffure ;
·
Possession de décoratif
d’habillement comme lunette de marque, bijoux précieux ou autre.
|
|
c)
Critères liés à l’histoire sociale de l’individu
La démarche empruntée ici
n’est ni historiographique, ni policière. Elle permet simplement d’établir une
relation déductive entre le vécu des individus et des paramètres de la violence
communautaire et/ou urvaine. Car c’est l’histoire des gens qui font société. En
tissant entre eux, au quotidien comme dans la durée, des liens de toutes
natures, les individus deviennent et deviendrons ce qu’ils en sont et seront
aujourd’hui et demain. Une telle
appréhension relationnelle des vécus individuels et des destins collectifs, permettra
de poser les liens les facteurs de violence au niveau communautaire et/ou
urbaine et le cheminement des individus dans la société.
Les dimensions sociales
que nous proposons de privilégier, ici sont liées au parcours migratoire du
candidat au programme, les héritages en termes de pratique socioprofessionnel
de ses parents, ses relations sociales et ses connaissances de la violence.
Le tableau, ci-dessous
donne des indications, plus pou moins sommaire, sur la manière dont ces
dimensions peuvent être évaluées.
#
|
Dimension
|
Critère de mesure
|
Cote
|
1.
|
Parcours migratoire
|
·
Zones
d’origine ;
·
Zone de transit
ou de résidence à des périodes subséquentes ;
|
|
2.
|
Activités professionnelles des parents
|
·
Type
d’activités
|
|
3.
|
Relation sociale
|
·
Membre
d’association sociocommunautaire ;
·
Membre de
mouvement ou de parti politique.
·
Membre
d’association socio-professionnelle.
|
|
4.
|
Connaissance de la violence
|
·
Savoir
manipuler une arme à feu ;
·
Pratique de la
chasse ;
·
Avoir vu des
scènes de violence ;
·
Avoir été
victime de la violence ;
·
Avoir eu un
proche parent victime de la violence
|
|
Le modèle proposé étant
conçu de manière pro-objective, le processus et les critères d’identification
doivent être adaptés selon les besoins et les obstacles à les appliquer.
Néanmoins, ces changements doivent respecter les liens théoriques du changement
préconisé par le programme de référence.
III.
Processus de Sélection et de validation
La sélection des
bénéficiaires pourra se faire suivant un triple processus : Administratif ;
Communautaire et ; Mixte.
a) Processus administratif
D’abord il faudra créer
une structure stratégique pour la définition des grandes orientations du programme
dans le respect de l’appropriation au niveau local et suivant les axes
prioritaires définis par les autorités gouvernementale. A cette structure
s’adjoindra une structure technique qui assure le contrôle de la mise ouvre de
la vision stratégique du programme. Tous
le processus administratif devrait être entériné au niveau stratégique et
technique. L’approbation des critères théoriques d’identification des
bénéficiaires deviendraient le fondement du processus administratif. Ces structures
s’assureront que lesdits critères soient suivis et/ou amendés en fonction de
l’évolution de la dynamique sociale.
b) Processus communautaire
Le processus communautaire d’identification des
bénéficiaires est le plus participatif que possible. Il est déterminé par le biais
de groupes spécifiques incluant les autorités locales, les leaders
communautaires, des Notables et/ou chef de village, des autorités religieuses,
des associations et organisations communautaires de base, des acteurs
humanitaires et/ou partenaires affiliés au système des Nations et d’autres
activistes communautaires.
c)
Processus mixte
Le processus mixte combinera les critères administratifs aux
critères communautaires. A ce niveau les bogues et/ou erreur de système de
collecte et traitement pourraient être corrigés.
d)
Système informatique d’analyse de critères et
particularité de traitement
Les données permettant
d’évaluer la correspondance du statut du candidat au profil recherché seront
saisies dans une base de données et traitée avec un programme informatique sur Microsoft Access.
Ce système permettra d’augmenter l’objectivité et la neutralité dans la
sélection.
IV.
En guise de conclusion
La mise en place et l’utilisation
d’un système de sélection objectif des bénéficiaires des projets d’un programme
d’apaisement social visant la prévention et/ou de Réduction de la Violence
Communautaire et/ou urbaine permettra d’éviter des reproches, non seulement de
la part des Auditeurs mais aussi, des membres des communautés cibles du
programme. Le processus et les outils doivent
être testés au début du programme et adaptés selon les observations de terrain.
Enfin faisons remarque, qu’en
dépit du fait que le programme cherche à diminuer les potentialités de la
violence dans les communautés, le processus d’identification des bénéficiaires
devrait tenir compte, par exemple, des personnes frappées d’incapacité
physique, même si cette incapacité n’est pas strictement liée à leur
association ou affectation dans le cycle de la violence communautaire. Cela permettrait
d’éviter que de tels programme sont fait pour récompenser les bandits, et en le
faisant on encouragerait tacitement les gens à être de la sorte.
Jean Laforest Visene
Sociologue, M.A. es Sc.
Développement
Professeur à l’Université d’Etat d’Haïti (UEH)
E-mail : visenejl@gl.com
Web page : www.visenjl.blogspot.com
Professeur à l’Université d’Etat d’Haïti (UEH)
E-mail : visenejl@gl.com
Web page : www.visenjl.blogspot.com
[1] Voir : L’article de Florence Morestin, Patricia Grant & Valéry Ridde (Université de
Montréal, Canada), « Les critères et
les processus d’identification des pauvres en tant que bénéficiaires de
programmes dans les pays en développement »,
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